Les médicaments
Une maladie systémique
Un lymphome est, lors de son diagnostic, une maladie disséminée qui requiert des traitements systémiques. De ce fait, la chimiothérapie, l'immunothérapie et les thérapies ciblées tiennent une place très importante dans le traitement des lymphomes, quel qu'en soit le stade d'évolution. Ces différentes thérapies utilisées seules ou en association sont actives, même aux stades avancés de la maladie.
L’objectif du traitement est « stériliser » les proliférations de cellules dans les ganglions lymphatiques.
La chimiothérapie dans les lymphomes
C’EST LA BASE DU TRAITEMENT …
La chimiothérapie constitue le traitement essentiel des LNH. Elle est basée sur des associations dont les doses varient en fonction de l'âge et du type de lymphome.
De nombreux médicaments et associations de médicaments anticancéreux (protocoles de traitement) sont efficaces dans le traitement des lymphomes. Leur utilisation dépend du type de lymphome et de son extension.
Dans certains lymphomes existe un risque de rechute méningée (méninges = enveloppes du cerveau et de la moelle épinière) et il donc nécessaire d'administrer, à intervalle régulier (entre 4 et 12 fois), la chimiothérapie (méthotrexate) dans les méninges par ponction lombaire.
LES PRINCIPES DU TRAITEMENT…
Les principes régissant l’utilisation de ces protocoles de chimiothérapie dans le traitement des lymphomes sont les suivants :
- Une rémission complète doit être obtenue avec le traitement de première intention pour pouvoir guérir la maladie. Une rémission « complète » correspond à la disparition complète des signes de la maladie.
- Les protocoles de chimiothérapie doivent être délivrés à pleines doses, en respectant les intervalles thérapeutiques. L’utilisation de facteurs de croissance hématopoïétiques (G-CSF ou GM-CSF) pour parer à une diminution trop forte des globules blancs, en particulier, peut être utile dans certains cas pour respecter le rythme des cycles et éviter les diminutions de doses.
EN PRATIQUE…
Les traitements durent de quatre à huit mois ; des traitements plus prolongés ne sont pas nécessaires, en règle générale, lorsqu’une réponse initiale est satisfaisante.
Le choix d'un protocole par l'équipe d'oncologie est fonction du type de lymphomes, de son extension et de votre état général (voir plus loin). Ils seront discuter lors de la Réunion de Concertation Pluridisciplinaire (RCP).
Les protocoles décrits dans ce document ont été validés sur le plan scientifique et sont dits "traitements standard".
Le traitement est le plus souvent administré en hôpital de jour mais parfois des hospitalisations sont nécessaires en raison du type de traitement ou de votre état général.
Les « intensifications thérapeutiques »
POURQUOI ?
Cette une modalité de traitement importante dans les formes agressives de lymphomes. Dans ce cas, l’oncologue va pouvoir agir sur deux paramètres, non exclusifs, de la chimiothérapie.
Il peut augmenter la dose administrée. C’est une « intensification ». Par exemple, c’est le cas du protocole « ACVBP » dans lequel les doses de doxorubicine et de cyclophosphamide sont plus élevées que dans le protocole « CHOP ».
Il peut réduire la durée entre les cycles de chimiothérapie de 3 à 2 semaines. C’est une « densification ».
Pour améliorer la tolérance de ces chimiothérapies « fortes », le médecin utilisera des facteurs de croissance médullaire pour contrecarrer la diminution des globules blancs.
LES « INTENSIFICATIONS THÉRAPEUTIQUES » AVEC AUTOGREFFE DE CELLULES SOUCHES
Introduction
Les cellules malignes des lymphomes sont sensibles aux chimiothérapies et que, plus la dose de chimiothérapie utilisée est forte, plus l'effet sur ces cellules est important.
En pratique, l'augmentation des doses de chimiothérapie se heurte à une augmentation de la toxicité, en particulier pour les cellules du sang. C'est pour permettre des traitements très intensifs que des « intensifications thérapeutiques », avec autogreffe de cellules souches, ont été mises au point.
Un rappel : les cellules souches …
Les cellules souches donnent naissance à toutes les cellules du sang : globules rouges, globules blancs et plaquettes. Elles se trouvent dans la moelle osseuse contenue dans les os du bassin, le sternum et les côtes chez l'adulte. Ces « cellules souches » sont capables de circuler dans le sang, on parle alors de cellules souches périphériques.
Les chimiothérapies et les facteurs de croissance médullaire, G-CSF ou GM-CSF (Neupogen™, Granocyte™) favorisent la circulation de ces cellules souches.
L'autogreffe
Chaque patient est son propre donneur quand la moelle peut être prélevée, suffisamment riche et sans envahissement tumoral. C’est une greffe de cellules souches sanguines appartenant au patient qui sont cultivées en dehors du corps et réinjectées par la suite.
Les cellules souches sont les cellules qui donnent naissance à toutes les cellules du sang (globules rouges, globules blancs et plaquettes). Elles se trouvent dans la moelle osseuse (sur tous les os du bassin, le sternum et les cotes chez l'adulte) mais sont capables de circuler dans le sang, on parle alors de cellules souches périphériques.
Les chimiothérapies et les facteurs de croissance G-CSF ou GM-CSF (Neupogen™, Granocyte™) favorisent la circulation de ces cellules souches.
Cette technique permet d'intensifier les traitements pour détruire plus de cellules cancéreuses et de cellules normales, ces dernières étant seules remplacées par la greffe. Elle comprend quatre étapes :
Première étape : traitement d’induction et « conditionnement »
Le patient, au cours d'une chimiothérapie, reçoit des injections de facteur de croissance qui permettent une bonne circulation des cellules souches.
Pour ce faire, on utilise la vincristine, la doxorubicine et de la cortisone sous forme de dexaméthasone, c’est-à-dire un protocole de type « VAD » (Vincristine, Adriamycine (doxorubicine) et Dexaméthasone).
Le traitement comprend 3 à 4 cycles à 3 semaines d’intervalle. Le traitement alternatif utilise de la thalidomide associée à la dexaméthasone orale.
Seconde étape : le prélèvement des cellules souches
Lorsque le nombre de cellules souches circulantes est satisfaisant, le sang est prélevé grâce à un appareil qui sélectionne les cellules souches. Cette « cytaphérèse » nécessite de poser une aiguille dans une veine pour prélever le sang et une autre pour réinjecter la part qui n'est pas prélevée.
La procédure dure environ 3 heures et entre une et trois cytaphérèses sont habituellement suffisantes pour permettre le prélèvement nécessaire à la pratique d'une « intensification thérapeutique ».
Rarement, les cellules souches ne circulent pas suffisamment pour permettre un prélèvement satisfaisant. On est alors amené à effectuer directement un prélèvement des cellules souches dans la moelle osseuse. Ce prélèvement nécessite une anesthésie générale et les cellules souches sont prélevées par ponctions sur l'os du bassin.
Le prélèvement de cellules souche est ensuite congelé, parfois après avoir reçu un traitement "ex-vivo" ou après avoir subi des tests. Les cellules congelées peuvent être conservées pendant plusieurs années.
Troisième étape : l’intensification thérapeutique
Au traitement d’induction fait suite la phase dite d’abrasion médullaire dont le but est de détruire les cellules tumorales. Cette phase dure de 5 à 7 jours.
Plusieurs types de chimiothérapie peuvent être utilisés, telles que le BEAM, le CBV, le melphalan, le TAM, etc…
La chimiothérapie est aussi, parfois, associée une irradiation à la dose de 8 Gray, de l'ensemble du corps (Irradiation Corporelle Totale ICT), en anglais (Total Body Irradiation ou TBI)
Quatrième étape : la transplantation « autogreffe » de cellules souches
Un à trois jours après la fin de « l'intensification thérapeutique », les cellules souches sont décongelées puis transfusées au patient.
Les cellules souches réinjectées vont alors se loger dans la moelle osseuse et produire au bout de 10 à 20 jours les cellules du sang. Pendant cette période, le nombre de cellules du sang (globules blancs et rouges, plaquettes) sont très basses en raison de la chimiothérapie et ou de la radiothérapie à fortes doses.
Comme les cellules souches injectées ne sont pas encore en état de faire remonter les cellules du sang périphérique (période dite d'aplasie), le patient est habituellement placé dans un environnement cherchant à le protéger des infections.
IMPORTANT...
Avec l’évolution des conditionnements atténués (traitements qui préparent à la greffe), la durée d’hospitalisation après la greffe est de plus en plus courte et s’effectue en hospitalisation de jour.
Le rituximab
QUELQUES DÉFINITIONS …
Un anticorps (immunoglobuline)
C’est une protéine fabriquée par l’organisme pour combattre l’infection. Un anticorps est une molécule qui reconnaît spécifiquement une autre molécule, l'antigène. Normalement, le système immunitaire produit des anticorps dirigés contre les bactéries et les virus. Lorsqu’un anticorps reconnaît une substance étrangère à l’organisme (un antigène), il s’attache à cette substance et, avec l’aide du système immunitaire, la détruit.
Un anticorps monoclonal
On sait, maintenant, produire industriellement des anticorps très purs et très spécifiques d’un seul antigène, ce sont les anticorps monoclonaux .
C’est une substance créée par les scientifiques pour reconnaître des substances précises étrangères à l’organisme et les détruire. Ces anticorps sont spécifiques d’une protéine pour la quelle ils ont été construits.
LE RITUXIMAB (RITUXAN/MABTHERA™)
Son mode d'action
C’est un anticorps monoclonal chimérique, d’où le suffixe ximab. Environ 80 % de la structure de la molécule est d’origine humaine, notamment le fragment Fc et une minorité d'origine murine (de souris), notamment le site de liaison à l'antigène qui reconnaît le CD20+ ( CD = Cluster of Differenciation ) des lymphocytes B des lymphomes non-hodgkiniens.
Un fois le CD20+ reconnu, le médicament provoque une lyse des lymphocytes B et pré-B par cytotoxicité dépendante du complément et par apoptose.
La déplétion lymphocytaire ainsi induite est profonde et durable, de 6 à 12 mois.
Son efficacité pour les lymphomes de bas grade
En traitement d’attaque, ce médicament, seul, permet obtenir, chez les malades en rechute ou réfractaires aux traitements, plus de 50 % de réponses thérapeutiques pendant plus d’un an.
En association avec une chimiothérapie conventionnelle, en traitement de initial (première ligne), le rituximab augmente significativement le temps sans progression de la maladie ainsi que le nombre de malades en vie.
En traitement d’entretien, cet anticorps allonge le temps sans progression de la maladie et, pour les patients en rechute, il permet augmente le nombre de malades en vie.
L'expérience suédoise...
L'utilisation du rituximab s'est traduit par une augmentation de la survie à 5 ans qui est passée de 70 % dans les années 2000 à 85 % en 2014.
Le bénéfice est le plus net a été observé chez les femmes et les patients de plus de 70 ans.
Dans le traitement des lymphomes agressifs
L’association du rituximab à une chimiothérapie de type CHOP augmente significativement le taux de réponses complètes. En revanche, le traitement d’entretien ne semble pas avoir d’effet majeur sur le déroulement de la maladie.
Pour les lymphomes du manteau, l’association rituximab et de CHOP permet d’optimiser le contrôle de la maladie.
Les indications actuelles
Les indications reconnues en France, à ce jour, pour ce médicament sont :
- Les lymphomes folliculaires de stade III ou de stade IV
- En seconde ligne, lors d’une rechute, en traitement d’attaque ou d’entretien
- En première ligne, en association avec une chimiothérapie,
- Les lymphomes B agressifs CD20+, en traitement de première ligne en association avec une chimiothérapie de type CHOP
Ce médicament, dans le cadre de protocoles expérimentaux est aussi utilisé pour le traitement des lymphomes du manteau et des lymphomes de la zone marginale, en association avec la chimiothérapie.
Avant le traitement...
L’équipe médicale vérifiera, au préalable, que vous n’avez pas de maladie infectieuse chronique, comme la tuberculose, que le traitement pourrait réveiller. Avant le traitement, une prémédication avec du paracétamol et un antihistaminique vous sera prescrite, parfois associée à de la cortisone.
Le traitement
Le rituximab s’administre par voie veineuse en perfusion à la dose de 375 mg/m². Un cycle de traitement comporte, lorsqu’il est utilisé seul, 4 injections avec un intervalle d'une semaine.
Lorsqu’il est donné en association avec une chimiothérapie, le MabThéra™ est administré le premier jour de la chimiothérapie pendant 6 à 8 cures.
Les effets indésirables
La toxicité du rituximab est faible en dehors du syndrome de relargage des cytokines (si le nombre de cellules malignes est très élevé) qui se caractérise par des troubles respiratoires de la fièvre et des manifestations allergiques.
Les premières injections peuvent s’accompagner de fièvre mais aussi parfois des nausées, de la fatigue ou des maux de tête. Des effets secondaires, plus sérieux, de type allergique sont rares, mais justifient une perfusion particulièrement lente (6 à 8 heures), au début et une surveillance lors des premières injections. Ceci peut justifier une hospitalisation de jour.
Les autres injections durent 3 heures et peuvent être réalisées en ambulatoire, mais vous ne pourrez pas conduire après le traitement.
Les autres anticorps monoclonaux
- Une chimiothérapie en induction, suivi d’un traitement d’entretien chez les patients répondeurs, est indiqué chez les patients atteints de lymphome folliculaire avancé non précédemment traités
- La bendamustine en induction, suivi d’un traitement d’entretien chez les patients en cas de non-réponse ou de progression, pendant ou dans les 6 mois suivant un traitement incluant du rituximab.
Le traitement nécessite une prémédication pour prévenir des réactions allergiques et/ou un syndrome de lyse tumorale. Il comporte 6 cycles de 28 jours.
C'est un immunoconjugué composé d'un anticorps monoclonal chimérique anti-CD30 couplé à un agent cytotoxique antimicrotubule, le monométhyl auristatin E (MMAE).
Son utilisation en monothérapie, permet d'obtenir un taux de réponse globale de 75 % chez des patients atteints de maladie de Hodgkin chimio-réfractaire ou en rechute et de 86 % chez des patients atteints de lymphome T anaplasique à grandes cellules chimio-réfractaire ou en rechute. Il est indiqué pour le traitement
- Du lymphome hodgkinien (LH) CD30 positif récidivant ou réfractaire chez l'adulte : après greffe autologue de cellules souches (ASCT), ou après au moins deux traitements antérieurs quand l'ASCT ou une polychimiothérapie n'est pas une option de traitement.
- Du lymphome anaplasique à grandes cellules systémique (LAGCs) récidivant ou réfractaire chez l'adulte.
Les deux principaux effets secondaires observés sont la neuropathie périphérique et la neutropénie.
- En association au rituximab, au cyclophosphamide, à la doxorubicine et à la prednisone (R-CHP) en première ligne.
- En association à la bendamustine et au rituximab, en rechute ou réfractaire, non candidats à une greffe de cellules souches hématopoïétiques.
La dose recommandée est de 1,8 mg/kg, administrée en perfusion intraveineuse tous les 21 jours
idélalisib (Zydelig™)
Il inhibe la PI3K delta, une protéine qui est surexprimée dans de nombreuses tumeurs malignes à cellules B et qui joue un rôle dans la survie, la prolifération et la migration des cellules cancéreuses.
Ses indications homologuées en association au rituximab dans le traitement
- De la leucémie lymphoïde chronique ayant reçu au moins un traitement antérieur
- De la LLC comme traitement de première intention chez les patients présentant une délétion 17p ou une mutation TP53 et pour lesquels une chimio-immunothérapie n'est pas appropriée.
- En monothérapie dans le traitement du lymphome folliculaire réfractaire à deux lignes de traitement antérieures.
Sa posologie
La dose recommandée est de 150 mg, par voie orale, 2 fois par jour.
Le traitement doit être poursuivi jusqu'à progression de la maladie ou apparition d'une toxicité inacceptable. Le comprimé doit être avalé en entier, avec ou sans nourriture.
L'immunothérapie par interféron alpha (IntronA™, Roféron A™)
EN BREF
C’est une immunothérapie non spécifique. L’interféron est une glycoprotéine (protéine sucrée) naturelle qui a été découverte en 1957. Il a fallu attendre les années 90 pour qu’il puisse être obtenu par génie génétique.
C'est un inhibiteur de la synthèse des cellules myéloïdes et des virus. C'est un médicament qui permet d'obtenir à la fois des rémissions hématologiques et des rémissions cytogénétiques. Il améliore la survie en permettant de très longues rémissions.
SES RARES INDICATIONS DE NOS JOURS
Il est indiqué pour le traitement des lymphomes folliculaires de masse tumorale élevée en association à un protocole de chimiothérapie d'induction de type CHOP (cyclophosphamide, prednisone, vincristine et doxorubicine).
Il est utilisé pour traiter la leucémie à tricholeucocytes.
Il est aussi proposé pour le traitement des lymphomes cutanés à cellules T en évolution, réfractaires ou ne relevant pas des traitements conventionnels.
EN PRATIQUE
Le schéma posologique recommandé est de 6 MUI/m² en sous-cutané de J 22 à J 26 de chaque cycle de 28 jours.
Des contre indications, notamment allergiques existent à son emploi.
Les effets secondaires les plus fréquemment rencontrés, le plus souvent rapidement régressifs, sont :
- Un état grippal avec de la fièvre et des courbatures,
- Une baisse des globules blancs (leuco-neutropénie),
- Une baisse des plaquettes (thrombopénie),
- Un état dépressif,
- Des atteintes des nerfs.
La radio immunothérapie
LE PRINCIPE
Plusieurs anticorps anti-CD20 ont été couplés à des isotopes radioactifs, offrant la possibilité de cibler la radiothérapie aux cellules lymphomateuses fixant l’anticorps, mais également aux cellules avoisinantes qui ont éventuellement perdu la capacité de fixer cet anticorps.
LES ANTICORPS MONOCLONAUX COUPLES À UN ISOTOPE : LE ZEVALIN™
Le Zevalin™ ou ibritumomab tiuxétan est couplé à l’yttrium 90. Son administration peut se faire en ambulatoire. Il est disponible en France.
Il est est indiqué chez les adultes dans le traitement de consolidation après induction d’une rémission chez les patients atteints d’un lymphome folliculaire non traités antérieurement ainsi que pour le traitement du lymphome non hodgkinien (LNH) à cellules B CD20+, de type folliculaire, en rechute ou réfractaire
après traitement par le rituximab.
Mise à jour
22 août 2023