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Les thérapies ciblées

Avant propos

UNE DÉFINITION PARMI D'AUTRES...

Les médicaments désignés sous le terme générique de thérapie ciblée  sont dirigés contre des cibles moléculaires : récepteurs, gènes ou protéines impliquées dans les voies de signalisation intracellulaires jouant un rôle dans la transformation des cellules en cellules cancéreuses ou dans le développement des tumeurs malignes.
Par opposition aux médicaments de chimiothérapie traditionnelle qui s’opposent, globalement, à la multiplication des cellules, les médicaments de chimiothérapie ciblée visent les mécanismes intimes de la cancérisation des cellules.

LES CIBLES POTENTIELLES DANS LA CELLULE TUMORALE

La cellule tumorale peut être directement atteinte par :

  • Les inhibiteurs du signal de transduction : la famille HER (EGFR = Epidermal Growth fFctor , HER2…) ou de la voie KIT, RAS, MAPK, PI3K ou d'autres voies...
  • Les inhibiteurs du cycle cellulaire
  • Les modulateurs de l’apoptose ...


DE NOMBREUSES MOLÉCULES HOMOLOGUÉES...

C’est un grand progrès dans le traitement des cancers du rein avancés ou avec métastase. Plusieurs médicaments ont été homologués pour cette indication. Sept molécules sont actuellement disponibles :

  • Quatre inhibiteurs des tyrosines kinases (TKIs) (le sunitinib, le sorafenib, le pazopanib et l’axitinib)
  • Un inhibiteur du VEGF : le bevacizumab associé à l’interféron (IFN)
  • Deux inhibiteurs de mTOR (le temsirolimus et l’everolimus) 

Les inhibiteurs de l’angiogenèse

UN PETIT HISTORIQUE

C’est Judah Folkmann médecin américain (1933 - 2008) qui, en 1971, a été le premier à avoir démontré le rôle essentiel de l'angiogenèse tumorale au cours de l’évolution des cancers.
Plus tard, Napoleone Ferrara, découvrira le facteur de croissance vasculaire VEGF, facteur clé de l’angiogenèse tumorale avec la firme pharmaceutique Genentech. 
Par la suite, des travaux de recherche fondamentale ont montré que l'angiogenèse tumorale , au travers de l’intervention du facteur induit par l'hypoxie, HIF (Hypoxia Induced Factor) était très important dans le développement des cancers du rein.

ANGIOGENÈSE ET CANCER DU REIN…

L’angiogenèse est une cible de choix pour le traitement des cancers du rein car assez fréquemment il existe une mutation du gène VHL. Cette mutation entraîne une activation du (HIF) et une stimulation du facteur de croissance vasculaire (VEGF) qui aboutissement à l'induction d'une néo-vascularisation de et de la prolifération des vaisseaux.
D'autres facteurs, comme les récepteurs au VEGF 1 et 2 et ceux du PDGF-bêta sont aussi  surexprimés dans plus de la moitié des cancers du rein à cellules claires.

Les médicaments contre l'angiogenèse

AVASTIN™ (BEVACIZUMAB)

Le bévacizumab est un anticorps monoclonal humanisé produit par la technologie de l’ADN recombinant dans des cellules d’ovaire de Hamster Chinois. Ce médicament s'oppose au développement des vaisseaux autour de la tumeur.
Il est indiqué comme traitement de première ligne cancer du rein métastatique en association avec interféron.
La posologie recommandée est de 10 mg/kg, administré une fois toutes les 2 semaines, en perfusion intraveineuse. Le médicament s’administre en perfusion intraveineuse de 90 minutes, la première fois, puis de 30 minutes, les cures suivantes. Le traitement doit être poursuivi jusqu’à la progression de la maladie. Si une chirurgie est envisagée, le traitement sera arrêté au moins un mois avant l'opération.
La tolérance est généralement acceptable. Les effets secondaires possibles, mais rares, seront, de toute façon, anticipés par l’équipe soignante. Il peut s’agir d’un retard de cicatrisation, d’une hypertension artérielle, d’une protéinurie (« albumine » dans les urines), d’embolies ou une tendance hémorragique accrue.

SUTENT™ (SUNITINIB) 

C’est un inhibiteur actif par voie orale de la tyrosine kinase du VEGFR, du PDGFR (Platelet Derived Growth Factor) et du récepteur c-Kit (ITK). 
Il est indiqué dans le traitement de première ligne des cancers du rein avancés et/ou métastatiques. Il vient d'être homologué comme traitement adjuvant.
Avant d'être prescrit ce médicament implique un bilan cardiologique, hépatorénal, hématologique et surtout thyroïdien. De plus, il est important pour votre oncologue de connaître tous les médicaments que vous prenez car ce traitement est associé avec d'assez nombreuses interactions médicamenteuses.
La dose recommandée est de 50 mg, par voie orale, à raison d’une prise quotidienne le matin pendant 4 semaines consécutives, suivie d’une fenêtre thérapeutique de 2 semaines, correspondant à un cycle complet de 6 semaines.
Si une chirurgie est envisagée, le traitement sera arrêté au moins 15 jours avant l'opération.
Sa tolérance est acceptable, cependant, on peut néanmoins observer, surtout durant les 2 ou 3 premiers cycles, des effets indésirables. Les plus fréquents sont de la fatigue, des diarrhées, une mucite (stomatite), une dyspepsie, des nausées, et des vomissements, une hypothyroïdie qui sera compensée si le taux de TSH dans le sang dépasse 6 ou 7 et une hypertension artérielle  (HTA) qui sera prise en charge. Les autres effets indésirables moins fréquents, comprennent des hémorragie, en particulier du nez (épistaxis), des éruptions cutanées ou un syndrome mains-pieds, une modification de la couleur de la peau, probablement due à la couleur du principe actif (jaune), une thrombopénie et/ou une neutropénie et plus rarement des perturbations du fonctionnement du foie et du pancréas. 
Des interactions médicamenteuses sont possibles (CYP3A et 4). Il vous faudra signaler à votre médecin, tous les médicaments que vous prenez, quelle soit leur indication.

NEXAVAR™ (SORAFENIB)

C’est un médicament actif par voie orale qui est un inhibiteur multikinase du VEGFR, du PDGFR et du récepteur c-Kit (ITK), ayant démontré in vitro et in vivo des propriétés à la fois antiprolifératives et anti-angiogéniques.
Ce médicament est homologué pour le traitement du carcinome rénal avancé après échec d’un traitement préalable à base d’interféron ou d’IL-2 ou lorsque ces médicaments sont contre-indiqués, c'est-à-dire en seconde ligne métastatique.
Le médicament s’administre, seul, en continu, en deux prises quotidiennes de deux comprimés dosés à 200 mg en dehors des repas ou avec un repas pauvre en graisse. Il n’y a pas de limitation de durée d’administration du médicament. Si une chirurgie est envisagée, le traitement sera arrêté au moins 15 jours avant l'opération.
La tolérance est relativement bonne. Néanmoins, on peut, cependant observer : de la fatigue, des diarrhées et mucites, des problèmes dermatologiques comme des rashs cutanés ou un syndrome mains-pieds, une élévation de la tension artérielle et, parfois, des retards de cicatrisation et des hémorragies

VOTRIENT/ARMALA TM  ( PAZOPANIB)

C'est un autre inhibiteur multikinase du VEGR/PDGFR, actif par voie orale.
Une étude de phase 3 chez des patients présentant une maladie avancée ou métastatique  a montré une augmentation de la survie et un doublement du temps sans progression de la maladie.
Le pazopanib est indiqué pour traiter le carcinome rénal avancé chez les patients qui n’ont pas reçu de traitement antérieur ou chez les patients qui ont déjà été traités par immunothérapie.
La dose quotidienne est de 800 mg, soit 4 comprimés à prendre en seule fois.  
Sa tolérance serait meilleure qu'avec les autres médicaments de cette classe. On peut, néanmoins, observer, surtout durant les 2 ou 3 premiers cycles, des effets indésirables. Les plus fréquents décrits au cous des essais thérapeutiques sont des diarrhées, une dyspepsie, des nausées, et des vomissements, de la mucite (stomatite), une hypertension artérielle (HTA), ou des atteintes du foie (hépatite) qui ipliquent une surveillance biologique régulière

INLYTA™ ( AXITINIB ) 

C’est aussi un inhibiteur de la tyrosine kinase, actif par voie orale qui bloque l’activité  des récepteurs du facteur de croissance de l'endothélium vasculaire (VEGFR-1, VEGFR-2 et VEGFR-3).
Il est homologué pour le traitement de seconde ligne de cancer du rein avancé après échec d'un traitement antérieur par sunitinib (Sutent™) ou cytokine.
Il s'administre par voie orale à la dose d'un comprimé à 5 mg, à prendre matin et soir.Le traitement doit être poursuivi tant qu'un bénéfice clinique est observé ou jusqu'à la survenue d'une toxicité inacceptable.
Sa tolérance est comparable à celle des autres médicaments de cette classe thérapeutique.

CABOMETYX™ (CARBOZANTINIB)

C'est un inhibiteur de la tyrosine kinase, actif par voie orale qui cible le récepteur du VEGFR ainsi que MET et AXL.
Il est indiqué dans le traitement du cancer du rein avancé chez les patients à risque intermédiaire ou élevé et non traités antérieurement (première ligne) et chez les patients adultes après une thérapie ciblée des récepteurs du facteur de croissance de l’endothélium vasculaire (VEGF) - (seconde ligne).
La dose est de 60 mg une fois par jour. Le traitement doit être poursuivi aussi longtemps qu’un bénéfice clinique est observé pour le patient ou jusqu’à la survenue d’une toxicité inacceptable.
Les précautions d'emploi et sa tolérance sont comparables à celles des autres médicaments de cette classe. Les effets indésirables possibles surviennent généralement au début du traitement. Il peut s'agir d'hypocalcémie, hypokaliémie, thrombopénie, hypertension artérielle, syndrome d'érythrodysesthésie palmoplantaire (syndrome pieds-mains), protéinurie et des effets digestifs (douleur, constipation, diarrhée et rarement vomissements).

 FOTIVDA™ (TIVOZANIB)

C'est un inhibiteur actif par voie orale du VEGFR1, 2 et 3. Cette molécule fait l'objet d'essais de Phase 3, en première ligne (TIVO-1) chez des patients présentant une maladie avancée avec des résultats positifs en termes de survie sans progression.
Ce médicament est homologué comme traitement de première ligne chez des patients adultes atteints d’un carcinome à cellules rénales avancé et chez les adultes n’ayant jamais reçu d’inhibiteur des voies VEGFR et mTOR suite à une progression de la maladie après un traitement antérieur par cytokine pour leur CCR avancé.
La posologie est de 340 µg une fois par jour pendant 21 jours, suivis d’une période de repos de 7 jours, constituant un cycle de traitement complet de 4 semaines. Il doit être poursuivi jusqu’à la progression de la maladie ou la survenue d’une toxicité inacceptable. 

Les inhibiteurs de la mTOR

LEUR MODE D'ACTION

Les inhibiteurs de la mTOR kinase sont des médicaments qui bloquent l’activation de cette enzyme. Ce blocage, pour la cellule tumorale, entraîne une inhibition de la croissance cellulaire, de la prolifération cellulaire et de l'angiogenèse. Chimiquement, ce sont des dérivés de la rapamycine ou sirolimus.

TEMSIROLIMUS (TORISEL™)

C’est analogue de la rapamycine actif par voie injectable.
Il est indiqué en traitement de première intention du carcinome rénal avancé chez les patients présentant au moins 3 des 6 facteurs de risque pronostique suivant la classification de Motzer.
La posologie recommandée st de 25 mg, administrés en perfusion intraveineuse d'une durée de 30 à 60 minutes une fois par semaine. Une prémédication avec un médicament anti-allergique (antihistaminique H1) en intraveineuse doit être instaurée environ 30 minutes avant le début de chaque perfusion. Le traitement doit être poursuivi tant que le patient en retire un bénéfice clinique ou jusqu'à l'apparition d'une toxicité inacceptable.
Sa tolérance est acceptable. Les principales toxicités retrouvées lors des essais thérapeutiques consistent en un état de fatigue, de la mucite parfois sévère qui implique un bilan par un stomatologue avant de débuter le traitement, des nausées et des diarrhées, une immunodépression avec un risque infectieux, des anomalies biologiques et hématologiques avec des leucopénies, des hyperglycémies et des hypertriglycéridémies

EVEROLIMUS (AFINITOR™)

C’est aussi un analogue de la rapamycine, actif par voie orale et déjà homologué pour la prévention des rejets au décours d’une transplantation d’organes.
Les études de développement Phase 3 ont montré que ce médicament, comparé au placebo, permettait de réduire le risque relatif de progression du cancer du rein de 67 %. Un quart des patients étaient stables pendant au moins 10 mois et la survie médiane était augmentée de plus de 3 mois.
Il est homologué pour le traitement du cancer du rein avancé chez les patients ayant progressé sous ou après une thérapie ciblée anti-VEGF-R (facteur de croissance de l'endothélium vasculaire).
La dose recommandé est de 10 mg, une fois par jour. Le traitement doit être poursuivi aussi longtemps qu'un bénéfice clinique est observé ou jusqu'à la survenue d'une toxicité inacceptable.
Sa tolérance est acceptable. Les principales toxicités possibles sont, un état de fatigue, de la mucite, des nausées et des diarrhées, un essoufflement (rares cas de fibrose pulmonaire), une immunodépression ainsi que des anomalies biologiques et hématologiques avec des leucopénies, des hyperglycémies et des hypertriglycéridémies.

Les thérapies ciblées homologuées en France pour le traitement du cancer du rein

Des inhibiteurs des tyrosines kinases (ITK) : le sunitinib, le lenvatinib
Deux inhibiteurs de mTOR : le temsirolimus , l'everolimus
Quatre inhibiteurs du VEGF : le bevacizumab, le sorafenib (anticorps monoclonal), le pazopanib, l’axitinib, le cabozantinib, le tivozanib (ITK)

Les propositions thérapeutiques selon les recommandations...

 

Classification pronostique IMDC

1re ligne 

2e ligne 

3e ligne 

Bon

Sunitinib
Pazopanib 

Cabozantinib
Nivolumab 

Cabozantinib
Nivolumab 

Intermédiaire
Standard 

Ipilimumab+nivolumab

TKI anti-VEGFR 

Autre thérapie ciblée 

Option 

Cabozantinib
Sunitinib
Pazopanib 

Nivolumab
Cabozantinib 

Nivolumab
Cabozantinib
Autre thérapie ciblée 

Réservé

Standard 

Ipilimumab+nivolumab 

TKI anti-VEGFR 

Autre thérapie ciblée 

Option 

Cabozantinib
Sunitinib 

Nivolumab
Cabozantinib 

Cabozantinib
Autre thérapie ciblée 

 

 

Les effets indésirables

 

Effet indésirable Suntinb 
(Sutent™)
Sorafenib 
(Nexavar™)
Bevacizumab 
(Avastin™) 
+ Interféron
Inhibiteurs mTOR 
Torisel™ et Afinitor™
Fatigue +++ ++ ++ +++
Nausées ++ + NON ++
Diarrhée +++ ++ ++ ++
Hypertension + + + NON
Problèmes de peau + ++ NON +
Saignement + + ++ NON
Essoufflement  NON + + ++
Thrombopénie +++ NON + +

 

Le tableau adapté d'une publication parue dans Progrès en Urologie (2008), Suppl. 7, S315–1 , résume les effets indésirables pouvant se rencontrés lors des traitements par biothérapies.

Mise à jour

1er décembre 2023