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Neutropénie

Une neutropénie

DÉFINITION

C’est une chute du nombre de globules blancs appelés polynucléaires neutrophiles en dessous du seuil de 1 700/mm 3 de sang.

CARACTÉRISTIQUES

Sa sévérité (profondeur)

La sévérité est classifiée en grades (1 à 4) selon le nombre de polynucléaires neutrophiles.
Elle est dite "sévère - grade 4" lorsque ce taux est inférieur à 500 /mm 3 ou inférieur à 1000/mm3 avec une décroissance attendue à moins de 500, en moins de 48 heures.

Sa durée

C'est un facteur important tant au niveau du diagnostic qu'à celui de la prise en charge. On distingue

  • Les neutropénies courtes (< 7 jours), sont, le plus souvent ,en relation avec une agranulocytose médicamenteuse, un cancer, un lymphome non-hodgkinien (LNH) non agressif, un myélome
  • Les neutropénies longues (> 7 j)ours), sont en rapport avec un traitement d'induction + consolidation d'une leucémie aiguë (LA) d'un LNH agressif ou d'une greffe de cellules souches hématopoïétiques (CSH)

Sévérité de la neutropénie (grades)

Paramètres Grade 1 Grade 2 Grade 3 Grade 4
Globules blancs > 3 000 2000 à 3000 1000 à 2000 < 1 000
Dont polynucléaires neutrophiles > 1 500 1000 à 1500 500 à 1000 < 500

Une neutropénie fébrile

DÉFINITION

C'est une complication grave fréquente au décours de la chimiothérapie. La neutropénie fébrile est définie selon l’Infectious Diseases Society of America (IDSA) par l’association de deux critères :

  • Une fièvre, définie comme une élévation de la température supérieure ou égale a 38,3 °C ou une température mesurée supérieure ou égale à 38 °C à deux reprises et à au moins une heure d’intervalle
  • Une neutropénie, c’est-à-dire un nombre absolu de polynucléaires neutrophiles (PNN) inférieur ou égal à 500/mm3 , ou inférieur à 1000/mm3 avec diminution prévisible à 500/mm 3 ou moins dans les 48 heures.
     

La classification internationale distingue, en outre :

  • Une fièvre d’origine inconnue pour laquelle on ne retrouve ni foyer infectieux ni germe ( 60 % des cas)
  • Une fièvre cliniquement documentée pour laquelle un foyer infectieux est découvert mais sans qu'un pathogène soit identifié ( 10 % des cas)
  • Une fièvre avec un pathogène identifié avec ou sans foyer infectieux ( 30 % des cas)
     

LES FACTEURS DE RISQUE

  • Type de chimiothérapie
    • Haut risque > 20% : topotécan IV ; carboplatine, docétaxel ; cisplatine – etoposide ; sunitinib
    • Intermédiaire 10-20% : carboplatine-etoposide ; CAV ; cisplatine-paclitaxel ; cisplatine-docétaxel ; cisplatine – vinorelbine
    • Bas < 10% : Docétaxel ; carboplatine-paclitaxel (bevacizumab) ; cisplatine-gemcitabine
  • Âge < 75 ans et/ou un mauvais état généra
  • D'être un homme
  • Présence d'une maladie évoluée
  • D'un épisode antérieur de neutropénie fébrile
  • L'absence de prophylaxie anti-infectieuse ou de facteurs de croissance médullaires (G-CSF)
  • L'existence d'une mucite
  • Une pathologie cardiovasculaire concomitante


LE RISQUE INFECTIEUX

Il est fonction de la profondeur de la neutropénie ; il est maximal pour un taux de polynucléaires neutrophiles <100/mmet de la durée de la neutropénie, inférieure ou supérieure à 7 jours.

LA LYMPHOPÉNIE

C'est une chute du taux de lymphocytes du sang. Elle entraîne une immunodépression plus brève et moins sévère que la neutropénie.
Les manifestations sont d’origine infectieuse.
Elle est particulièrement observée avec les agents alkylants, en particulier avec le cyclophosphamide. Elle est fréquence aussi avec les thérapies ciblées avec le sunitinib, le sorafenib, le pazopanib et l’everolimus.
Actuellement, il n'y a aucun traitement.
Sa réparation est lente et demande de 10 à 12 mois durant lesquels il existe un risque d’infections opportunistes si le nombre des lymphocytes CD4+ est inférieur à 0.2 x 10 9 L.

LE RISQUE INFECTIEUX

POURQUOI ?

Les globules blancs jouent un rôle très important dans la lutte contre les infections.
Chaque fois que le nombre de globules blancs chute, vous courez un risque de développer une infection. Comme ces cellules contribuent, aussi, à combattre les infections lorsqu'elles sont déclarées, il peut être plus difficile de les guérir quand le nombre de globules blancs est faible.

CLINIQUEMENT


Quels pathogènes ?
L'infection est, le plus souvent, endogène, c’est-à-dire que son point de départ est à partir de votre propre flore bactérienne.
Les germes endogènes sont surtout des entérobactéries (E.coli puis Klebsiella , Enterobacter , Citrobacter) ou des streptocoques
Les germes infectant les cathéters vasculaires sont surtout des staphylocoques.
Les infections retardées sont elles en relation avec une infection par le Pseudomonas aeruginosa , l'Aspergillus ou des candidoses (champignons).

Quels types d'infections


Une infection respiratoire, comme une pneumonie, pouvant être sévère, dans certains cas est fréquente.
Une infection du sang, ou bactériémie, souvent due à des bactéries Gram-négatives, est une complication possible et sérieuse. Cette infection du sang peut, très rarement, se compliquer d'un choc septique
Une infection par d'autres pathogènes, comme des virus, des parasites ou des champignons, peut se rencontrer mais, rarement lors des premiers cycles de chimiothérapie.

Les périodes critiques

Au cours d'un traitement de radiothérapie ou de chimiothérapie, le nombre de globules blancs peut chuter parfois à des taux très bas.
Le creux de la vague , appelé nadir, se situe entre le 8 et le 14ème jour, c’est-à-dire, lorsque vous êtes chez vous ! C’est pourquoi le nombre de globules blancs doit être régulièrement contrôlé au cours du traitement.
Si le nombre de globules blancs (surtout les polynucléaires) chute au-dessous de 1 000/mm 3 , l’équipe soignante vous indiquera les précautions que vous devrez prendre pour réduire les risques de développer une infection.

SYMPTÔMES D'ALERTE

Température > 38,3° C, associée ou non à des frissons ou sueurs
Toux, expectoration plus abondante, essoufflement ou respiration douloureuse
Sensation de malaise, même sans fièvre ou sans autre signe d'infection
Douleur ou brûlure lors des mictions ou urines odorantes
Changement de l'odeur, de la nature ou de la fréquence des selles (diarrhée)
Rougeur, douleur ou enflure de toute zone de la peau
Suppuration provenant de coupure ou d'irritation
Rougeur, douleur, enflure ou suintement autour de tout cathéter central, de la sonde d'alimentation parentérale, de la sonde urinaire

Comment prévenir les conséquences d’une neutropénie ?

LE CONTEXTE

Dès l'instant où la chimiothérapie entraîne la destruction des globules blancs, l'apparition d'une neutropénie est inéluctable.
Pendant la période où le nombre de globules blancs est très bas, il vous faut être particulièrement vigilant à l’apparition de signes et de symptômes pouvant évoquer une infection, tels ceux présentés dans l'encadré ci-dessus.
Dès les premiers signes d'infection, il faut prendre des mesures pour éviter qu'elle ne s'étende ou ne s'aggrave.

QUELQUES CONSEILS PRATIQUES...

Prenez des précautions pour diminuer le risque de blessure et donc d'infection…

  • Portez toujours des chaussures larges pour éviter les blessures aux pieds
  • Protégez vos mains des coupures et des brûlures
    • Quand vous faites la vaisselle, portez des gants de caoutchouc ; utilisez toujours des poignées ou d'autres protections lorsque vous cuisinez et pour tenir les récipients chauds
    • Portez des gants de jardinage
    • Si vous vous coupez ou vous vous écorchez, nettoyez immédiatement à l'eau et au savon et protégez la plaie par un pansement
    • Quand vous vous rasez les aisselles ou les jambes, utilisez un rasoir électrique pour éviter les coupures
  • Évitez les activités favorisant les chutes et/ou les blessures, comme, la bicyclette, le patinage, le ski, ...

Éliminez de votre alimentation toute nourriture non cuite pouvant contenir des germes, y compris

  • Les soupes froides composées de fruits frais ou de légumes
  • Les salades de légumes crus ou de fruits, les salades composées de viandes ou de poissons crus
  • Les fromages naturels non pasteurisés
  • Les œufs crus, les sushi et sashimi, les fruits frais, congelés ou séchés, les herbes crues, les épices et le poivre noir

De plus…

  • Évitez de toucher des fleurs fraîches et des plantes
  • Évitez les lavements, les suppositoires et la prise de température rectale
  • Ne faites pas de soins dentaires, sauf en cas d'urgence. Si vous devez consulter pour une urgence dentaire,  lors de la prise de rendez-vous, informez votre dentiste de votre traitement de chimiothérapie et du nombre de globules blanc. Vous pouvez, aussi, suggérer à votre dentiste de contacter votre oncologue avant de vous fixer un rendez-vous pour des soins.

Portez un masque FFP2
Lavez vous les mains, utilisez un gel hydroalcoolique
Respectez la distanciation sociale
Ne vous faites pas vacciner, y compris contre la grippe ou la COVID19 sans l'avis de votre oncologue !


QUAND DOIS-JE CONTACTER MON MÉDECIN ?

Si le nombre de globules blancs tombe au-dessous de 1000, vous êtes considéré comme neutropénique. Jusqu'à ce que leur nombre remonte, il est nécessaire que vous preniez des mesures pour diminuer le risque d'infection. Il vous faut alors prendre votre température quatre fois par jour mais jamais par voie rectale et informer votre médecin immédiatement si la température dépasse 38,5°C.
En cas d'apparition de signes ou de symptômes d'infection, prévenez votre médecin immédiatement. Il ne faut prendre aucun médicament, en particulier les médicaments destinés à faire baisser la fièvre (aspirine, paracétamol), avant de lui en parler.

Important, ne prenez pas d’antibiotiques de votre propre initiative !

Précautions dans la vie de tous les jours...

Respecter la distanciation sociale
Éloignez-vous des personnes ayant un rhume, la grippe ou toutes autres infections
Évitez les contacts avec toute personne qui a été récemment vaccinée, y compris les enfants
Évitez, autant que possible, la foule
Si vous devez aller dans un endroit où il y a beaucoup de monde, essayez d'y aller en dehors des heures de pointe, portez un masque
N’utilisez pas, si possible, les transports en commun. Si vous ne pouvez pas faire autrement, voyagez en dehors des heures de pointe

Les traitements contre l'infection...

Si vous développez une infection, votre médecin vous prescrira des médicaments pour la traiter.
Les antibiotiques sont la base du traitement des complications infectieuses des neutropénies. Comme il peut s’agir d’infections potentiellement sérieuses, on utilise, le plus souvent, un ou deux antibiotiques administrés par voie injectable.
Le premier traitement est dit probabilistique car l’équipe soignante ne connaît pas encore précisément la nature du germe. Le traitement sera ajusté à la 72 ème heure et d’autres médicaments pourront être ajoutés si l’on suspecte, par exemple, une infection à levure ( Candida albican s).

Si votre état nécessite des injections intraveineuses ou des perfusions, vous pouvez être autorisé à les recevoir à domicile si elles sont administrées par une infirmière spécialisée. L'état de certains patients nécessite une admission à l'hôpital pour traiter efficacement leur infection.
Si nécessaire, votre oncologue peut décider de retarder d'autres traitements jusqu'à ce que le nombre de globules blancs soit revenu à la normale et/ou à ce que l'infection ait disparu.

LES FACTEURS DE CROISSANCE MÉDULLAIRE

EN BREF...

Ce sont des glycoprotéines
Elles sont produites par les monocytes, les fibroblastes et les cellules endothéliales. Ils stimulent le développement et la maturation des globules blancs. En augmentant la production des globules blancs, les facteurs de croissance peuvent réduire le risque de développer une infection. Ils peuvent aussi être utilisés pour réparer une aplasie médullaire.
 
Ils peuvent vous êtes prescrits, dans plusieurs circonstances...
En prophylaxie primaire si votre chimiothérapie est intensifiée (doses plus fortes) ou densifiée (doses plus rapprochées).
En prophylaxie secondaire, si le taux de vos globules blancs polynucléaires passe au-dessous le seuil critique de 0,5 10 9 /l, au décours du traitement
A titre curatif, si vous présentez une neutropénie fébrile.

LES G-CSF (Granulocyte-Colony Stimulating Factor )

Les produits commercialisés sont les suivants

  • Le lénograstim (Granocyte™) est une molécule recombinante ( rHuGCSF) glycosylée comme la forme endogène de GSF
  • Le filgrastim (Neupogen™) est le rHuGCSF qui n'est pas glycosylé et les  biosimilaires , Nivestim™, Ratiograstim™, Tevagrastim™ et Zarzio™
  • Le pegfilgrastim (Neulasta™) est la forme pégylée du filgrastim a effet prolongé dans le temps et les biosimilaires et le lipegfilgastim.


Le Neupogen™,  le Granocyte™ et les  biosimilaires  (Ratiograstim™ et Zarzio™ )
Ces médicaments, d'usage hospitalier, sont donnés à la posologie quotidienne de 5 µg/kg pendant 10 à 14 jours après la fin de la chimiothérapie et seront continués jusqu'à la normalisation du taux de polynucléaires neutrophiles.

Le pegfilgrastim (Neulasta™)
La posologie est de 6 mg en une seule injection par cycle, 24 heures après la fin de la chimiothérapie. Ce produit est éliminé par les polynucléaires neutrophile dont il stimule la prolifération. Il est disponible en pharmacie de ville.
 
L'injection
Vous pouvez faire pratiquer l’injection par une infirmière ou vous pouvez faire l'injection vous-même, après avoir demandé à l’équipe soignante de vous apprendre la technique. Un membre de votre famille peut être formé pour faire les injections à votre domicile.

Les effets secondaires possibles
Ils sont bien tolérés avec peu de réactions générales ou de réaction d'hypersensibilité.
Ces médicaments peuvent être à l’origine de douleurs osseuses, surtout en période de réparation de la neutropénie qui s'atténuent avec le temps. Si cela est votre cas, signalez le, votre médecin pourra, alors, vous prescrire des médicaments contre la douleur.
Si l'utilisation se fait sur de longues périodes, des ostéopénie (diminution de la masse osseuse) ont été décrites ce qui imposera la réalisation d'une densitométrie osseuse pour suivre son évolution et décider d'éventuelles mesures correctrices.
Le risque de survenue d’une leucémie aiguë myéloïde ou d’un syndrome myélodysplasique est rare mais réel... 

IMPORTANT

Tous ces médicaments font l’objet d’une prescription particulière
Ils sont réservés à certains médecins et certains établissements de santé
article L.162-22 du Code de la Sécurité Sociale

Les vaccinations

LES VACCINATIONS UTILES

Après une chimiothérapie, l'effet vaccinal est probablement légèrement moins efficace. Néanmoins, il est très utile de vous protéger contre les infections en vous faisant vacciner contre la grippe, le pneumocoque et la COVID19

CONTRE-INDIQUÉS DURANT LA CHIMIO : LES VACCINS VIVANTS OU ATTÉNUÉS

Les vaccins suivants sont contre-indiqués durant la chimiothérapie et pendant 6 mois suivant son arrêt : rougeole, oreillons, rubéole, varicelle, rotavirus, fièvre jaune, zona, vaccin nasal antigrippal ainsi que le BCG.

Mise à jour

30 janvier 2021