Le surpoids et l'obésité
Ce que l'on sait...
Il existe une relation démontrée entre le risque de cancer et l'apport calorique. Pour expliquer cette augmentation de risque, les preuves avancées par les spécialistes sont les suivantes :
- On observe une réduction du risque de cancer en cas si réduction calorique.
- Les animaux de faible poids sont plus résistants aux radiations et aux carcinogènes chimiques. En cas de surabondance de calories, l'organisme s'oriente alors vers une stratégie reproductive, donc de multiplication cellulaire. A l'opposé, en cas de carence, l'organisme applique une stratégie d'endurance et indirectement de longévité, donc de restriction de multiplication cellulaire.
- Une alimentation riche entraîne une puberté plus précoce qui est elle-même un facteur reconnu de risque de cancer du sein
L'obésité est un facteur de risque démontré pour le développement d'un cancer de l'œsophage, du pancréas, de la vésicule biliaire, du colon et du rectum, de l'endomètre, du sein et du rein.
L'obésité
LE CONTEXTE
Les différentes étude menées dans différentes populations ont démontré le rôle important de l'alimentation et de l’activité physique sur la survenue de nombreux cancers.
Les données de l’OMS, bien que partiellement biaisées par une longévité différente dans les pays considérés, révèlent que la fréquence des cancers est plus de dix fois supérieure dans les pays développés et est corrélée aux apports énergétiques, à la sédentarité et à l’indice de masse corporelle (IMC) exprimé en kg/m². On estimait alors qu’environ 6 % de cancers chez la femme était attribuables au surpoids ou à l’obésité.
THE MILLION WOMEN STUDY
L’étude The million women study publiée dans la revue britannique British Medical Journal (BMJ 2007;33507:1134–1144) a confirmé ces résultats. Un excès de poids, chez la femme, est associé à une augmentation du risque relatif de développer la maladie.
Localisation |
Augmentation du risque relatif |
Intervalle de confiance 95% |
---|---|---|
Adénocarcinome de l’œsophage Cancer de l’endomètre Cancer du rein Myélome multiple et de leucémies. |
2,2 2,5 1,6 1,6 |
[1,4 à 3,6] [1,8 à 3,4] [1,3 à 2,1] [1,1 à 2,1] |
La relation cancer-obésité
LES CANCERS HORMONO-DÉPENDANTS
Le cancer du sein
Cette maladie est peu fréquent dans les pays pauvres et au Japon, qui était le pays industrialisé où l’obésité est la moins fréquente.
Les études ont montré une corrélation entre le poids, ou l’IMC et l’incidence du cancer du sein chez les femmes ménopausées. Ainsi, le risque relatif de mortalité par cancer du sein augmente proportionnellement avec l'IMC, passant de 1 pour un IMC inférieur à 25 kg/m² à 1,34 en cas de surpoids, 1,63 en cas d’obésité, 1,70 en cas d’obésité sévère et 2,12 en cas d’obésité massive.
Un IMC excessif majore également le risque de cancer d’un facteur deux dans les formes familiales.
Chez les femmes européennes obèses [ The million women study (BMJ 2007;33507:1134–1144) ], la maladie est non seulement plus fréquente mais également plus grave avec davantage de métastases ganglionnaires et un pronostic moins bon.
Une telle relation est aussi retrouvée dans la Nurses’ Health Study chez les femmes ménopausées n’ayant jamais utilisé de substitution hormonale. L’effet de la prise de poids à partir de 18 ans semble plus important que le poids observé à 18 ans. À la ménopause, les femmes n’ayant pas utilisé d’oestrogènes dont le gain pondéral était de 20 kg avaient un risque relatif augmenté par un facteur 2 (intervalle de confiance 95 % de 1,4 à 2,73). A l'opposé, chez les femmes non ménopausées, l’excès de poids avait un effet protecteur peut être du fait d’une ovulation moins fréquente.
Le cancer de l’endomètre
L’incidence augmente avec l’obésité. Une étude cas-témoin chez des femmes de moins de 80 ans, dont le diagnostic de cancer de l’endomètre était récent, a confirmé que l’obésité était un facteur de risque persistant après ajustement sur d’autres facteurs significatifs dans cette population, nulliparité, consommation de tabac, ménopause tardive, diabète.
Il existe une corrélation avec l’IMC et le risque est multiplié par trois pour des IMC supérieurs à 29 kg/m² par rapport aux IMC inférieurs à 23 kg/m².
Pour chaque augmentation de 5 kg/m² de l'IMC, une étude récente estime le risque relatif à 62 % (intervalle de confiance de 56 à 69 %)
Le cancer de l'ovaire
La relation de ce cancer hormono-dépendant avec l’obésité est moins nette. Cependant, une étude récente a montré une augmentation du risque relatif de 9 % (intervalle de confiance 4 à 14 %).
Le cancer de la prostate
Les habitudes alimentaires et l’obésité pourraient expliquer les variations de l'épidémiologie de ce cancer à travers le monde. Cependant, une telle association est encore mal établie par des études épidémiologiques assez discordantes.
La relation éventuelle est complexe car même si l’obésité n’augmente pas significativement la prévalence de la maladie, elle pourrait, néanmoins, constituer un facteur de promotion tumorale. De plus, le syndrome métabolique et l’obésité abdominale sont considérés comme des facteurs aggravant l’évolution de la maladie.
LES AUTRES CANCERS
Le cancer du côlon
Les données épidémiologiques ont montré une relation qui est plus marquée chez les hommes, quel que soit leur âge, que chez les femmes préménopausées.L'augmentation du risque relatif selon des études récentes serait de 10 % (intervalle de confiance 7 à 13 %).
L’obésité abdominale qui s'évalue par la mesure du tour de taille est également un bon indice, à tel point que les programmes de dépistage de la maladie devraient prendre en compte le tour de taille.
De plus, de nombreuses études concordantes ont démontré qu'une réduction pondérale durable et la poursuite d’une activité physique régulière sont de nature à réduire l’incidence de la maladie.
Le cancer de l’œsophage
L’association entre l’IMC et l’ adénocarcinome œsophagien est suggérée par la majorité des études qui montrent que l’IMC est un facteur indépendant de la présence d’un reflux gastro-œsophagien et indirectement de cancer. Le risque relatif est estimé à 16 chez les sujets ayant un IMC supérieur à 30 kg/m² par rapport à ceux ayant un IMC inférieur à 22 kg/m².
Chez les sujets obèses ayant un reflux gastro-œsophagien, le risque de développer la maladie est multiplié par 1,8.
Le cancer de vésicule biliaire
Il existe un augmentation linéaire du risque relation à chaque augmentation de 5 kg/m² de l'IMC. Une étude récente estime le risque relatif à 31 % (intervalle de confiance de 12 à 52 %)
Le cancer du pancréas
L'étude de l' American Cancer Society Cancer Prevention Study II Nutrition Cohort (Cancer Epidemiol Biomarkers Prev 2005;14:459–466 ) portant sur 145 627 hommes et femmes suivis pendant sept ans a évaluer le risque de cancer du pancréas. Les conclusions de cette étude confirme l’existence d’un effet indépendant du poids avec un risque relatif de 2,08 (intervalle de confiance 95 % de 1,48 à 2,93) pour un IMC supérieur à 30 kg/m² par rapport à un IMC inférieur à 25 kg/m². Il existe un effet indépendant de l’obésité viscérale abdominale alors que le niveau de l’activité physique est sans effet .
Il faut nuancer les conclusions de ce travail car les résultats d’autres études épidémiologiques sont discordants.
Le cancer du foie
Dans une méta-analyse, le risque relatif est de 17à 19 % (intervalle de confiance 95 % de 12 à 27 %) pour les sujets en surpoids et de 89 % (intervalle de confiance 95 % de 51 à 236 %) pour les sujets obèses.
Le cancer du rein
L’obésité est un facteur de risque encore discuté. Dans une étude publiée dans The New England Journal of Medecine ( 2000;343:1305–11) portant sur 363 992 hommes suivis en moyenne pendant 16 ans (1971 à 1992), le risque relatif est de 1,9 (intervalle de confiance 95 % de 1,3 à 2,7) chez ceux dont l’IMC se situe dans le décile supérieur. De plus, le risque est également majoré de façon indépendante chez les sujets hypertendus et fumeurs.
Les autres localisations
Toute une série de méta-analyses ont établi une relation positive entre l’IMC et le cancer de l'estomac, de la vésicule biliaire et de la thyroïde.
Le risque de lymphomes non hodgkinien, de myélome multiple, de leucémie, et de méningiome est également supérieur, selon la dernière étude du CIRC.
Augmentation du risque de cancer chez les obèses
- Adénocarcinome de l’œsophage
- Cardia de l’estomac
- Colorectal
- Foie
- Vésicule biliaire
- Pancréas
- Sein (post-ménopausique)
- Endomètre
- Ovaires
- Prostate (stade avancé)
- Rein
- Thyroïde
- Myélome multiple
- Méningiome
Les graisses
LES PREUVES
Elles sont apportés par les modèles animaux qui ont bien montrés la corrélation entre la consommation de graisses et le sur-risque de cancer.
Des corrélations de données épidémiologiques brutes par pays révèlent une relation claire entre consommation de graisses et les cancers du sein, de l’endomètre, du colon et de la prostate, c’est à dire les principaux cancers occidentaux non liés au tabac. Toutes les études convergent pour montrer une augmentation de risque plus forte avec l'excès de graisses animales.
LE CAS DU CANCER DU SEIN
L'incidence
Les études épidémiologiques ont montré un lien fort entre le taux de lipides sanguins et les cancers du sein. Par exemple, la fréquence du cancer du sein en Asie ou en Afrique est le cinquième de celle des États Unis. Dans ce dernier pays, avec la modifications des habitudes alimentaires, la fréquence de la maladie est en forte augmentation depuis 1900. Une diminution de l'apport en graisses représentant moins de 20 % des calories absorbées pourrait être préventif [ The Women's Intervention Nutrition Study - WINS (Am J Clin Nutr 2007;86:878S–881S) ].
Le risque de récidive
Plusieurs équipes ont clairement montré qu'une alimentation pauvre en graisse diminuait le risque de récidive d’un cancer du sein.
Une étude portant sur 2437 femmes opérées d’un cancer du sein a comparé l'influence sur la récidive d'un régime pauvre en graisses, bien suivi par rapport à une alimentation libre. Les résultats ont montré un pourcentage de de rechutes de 9,8 % chez les femmes respectant une régime pauvre en graisses contre 12,4 % pour celles suivant un régime libre.
LE CAS DU CANCER DU CÔLON
Au Japon, pays où traditionnellement l'apport en graisse animale était faible, l'occidentalisation de l'alimentation est parallèle à l'émergence du cancer du côlon dans ce pays.
Les recherches tendent à incriminer le rôle des acides biliaires et à un moindre degré de preuve celui de la viande rouge.
LE CAS DU CANCER DE LA PROSTATE
Il y a une corrélation bien établie entre la consommation excessive de graisses animales et le développement de la maladie. Des études plus fines ont, par ailleurs, montré le surrisque engendré par la consommation de viandes rouges et l'existence de cancers plus agressifs.
Mise à jour
21 juin 2019