Reconnaissance en maladie professionnelle
LES CANCÉROGÈNES
Il existe un certain nombre de substances considérées comme des cancérogènes certains pour l’homme. Ces substances appartiennent au Groupe 1 défini par le Centre International de Recherche sur le Cancer (CIRC) de Lyon.
Les substances du Groupe 1 peuvent être, soit inscrites dans un des tableaux des maladies professionnelles, soit relever du système complémentaire.
Deux situations possibles
LE CANCER EST INSCRIT DANS « UN TABLEAU » ET VOUS REMPLISSEZ LES HUIT CONDITIONS...
C’est le système principal de reconnaissance des maladies professionnelles pour le Régime Général (RG) de Sécurité Sociale et du Régime Agricole (RA). Pour obtenir réparation, huit conditions sont à remplir :
- L’affection doit être mentionnée dans un tableau. Celui-ci fixe les critères de reconnaissance de chaque maladie en fonction des expositions et du délai écoulé entre la fin celle-ci et l’apparition de la maladie. Le TRG s’applique au régime général et le TRA au régime agricole. Les dispositions législatives sont identiques pour les deux régimes, même si la numérotation des tableaux est différente.
- Il faut être salarié du régime général ou agricole de la Sécurité Sociale au moment de l’exposition, ce qui exclut les artisans, ou les professions indépendantes, en l’absence d’assurance spécifique.
- L’exposition au risque doit être habituelle (facteur très important).
- Le respect du délai de prise en charge. Il faut savoir que une liste Limitative (L) soit à une liste Indicative (I), emploi indifférent du moment qu’il y a eu exposition
- Il faut respecter une durée minimale d’exposition qui est définie dans certains tableaux,
- La confirmation de la maladie est effectuée par Médecin Conseil avec l’avis éventuel d’un médecin ayant des compétences particulières dans le domaine.
- La confirmation de l’exposition fait l’objet d’une enquête administrative de la Sécurité Sociale.
Si la maladie dont vous souffrez répond à tous les critères du tableau, la reconnaissance en maladie professionnelle se fait sans que vous ayez à faire la preuve de la relation entre votre maladie et votre exposition professionnelle. C’est le principe, comme pour les accidents du travail, de la présomption d’origine.
VOUS NE REMPLISSEZ PAS LES HUIT CRITÈRES OU LA MALADIE EST HORS TABLEAU
Le cadre légal
Dans ce cas, c’est le système complémentaire qui s’applique et relève alors de la loi n° 93-121 du 27 janvier 1993 . Cette loi permet deux possibilités d’extension de réparation , après avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles (CRRMP) composé
- D'un professeur d'université est nommé pour 4 ans par le préfet de région
- De l'ingénieur conseil du service prévention de la CRAM qui peut être amené à donner son avis à titre consultatif
- Du Médecin Conseil du service médical de l'assurance maladie qui présente les dossiers en tant que rapporteur
Premier cas de figure : il manque un des huit critères par rapport à un tableau de maladie professionnelle
Votre cas rentre dans le cadre de art. L461-I alinéa 3 du code de la Sécurité Sociale . Il peut, par exemple, manquer :
- Le délai de prise en charge est dépassé
- La durée d’exposition est insuffisante
- L’emploi ne figure pas dans une liste limitative « L »
Dans ce cas, il y a un passage obligatoire devant le CRRMP et ceci, quel que soit le taux d’IPP attendu.
La présomption d’origine ne s'applique pas et un lien direct entre la maladie et le travail doit être établi. Une réparation est alors possible.
Second cas de figure: le cancer dont vous souffrez ne fait pas partie d’un tableau mais vous avez été exposé à un cancérogène du groupe 1...
Vous êtes, dans ce cas, redevable l’alinéa 4 et R-461-8 de l’Article L461-I du code de la Sécurité Sociale .
Dans cette situation, le passage devant le CRRMP est obligatoire, uniquement, si taux d’IPP définitive prévu est supérieur à 66 %.
Il vous appartiendra d’apporter des arguments prouvant la relation de causalité entre votre maladie et votre exposition professionnelle.
La maladie doit être liée essentiellement et directement au travail. Dans ce cas, la présomption d’origine ne s’applique pas.
@ Pour en savoir plus : Service-Public.fr
110 tableaux permettant de reconnaître une maladie professionnelle
- 94 tableaux à numéro plein ; 11 tableaux à numéro bis ; 5 tableaux à numéro ter
- 55 listes de travaux sont indicatives
- 55 listes de travaux sont limitatives
- 18 tableaux prévoient une durée d'exposition minimale à la nuisance.
Réparation des maladies professionnelles
LE RÉGIME GENERAL DE LA SÉCURITÉ SOCIALE
Il prend en compte, pour l’indemnisation :
- Les maladies professionnelles indemnisables au titre d’une affection
- Appartenant à un tableau de maladie professionnelle
- Relevant du système complémentaire CRRMP
- Les maladies à caractère professionnel, relevant de l’Article L461-6 du Code de la Sécurité Sociale.
LES AUTRES RÉGIMES SALARIES
Le régime Agricole et celui de la fonction publique font, en général, référence aux tableaux des maladies professionnelles.
Pour le régime de la fonction Publique, les procédures font appel à la Commission de Réforme qui retient ou non, la notion de maladie contractée (ou aggravée) en service. Les personnels concernés sont :
- Les fonctionnaires de l’État
- La fonction Publique territoriale
- La fonction Publique hospitalière
- Les régimes spéciaux : EDF-GDF, SNCF
LES AUTRES…
Il s’agit des professions libérales, des travailleurs indépendants, des artisans, des bénévoles...
Dans ce cas la prise en charge n’est uniquement possible qu’en cas d’assurance volontaire.
Le code de la Sécurité sociale (art. L 461-1 Titre VI)
« Est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau ».
La maladie est inscrite à un tableau, la procédure
QUI DOIT DÉCLARER ?
La procédure de déclaration est rigoureuse et l'initiative de la déclaration vous revient et non à votre employeur.
QUELS SONT LES DOCUMENTS À FOURNIR ?
Les documents à fournir à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie (CPAM), pour le régime général sont :
- Un formulaire de déclaration (CERFA n° 60-3950)
- Un certificat médical (CERFA n° 11138*01 ou sur papier libre)
- Les justificatifs de salaire des périodes d’exposition au risque
- Une copie de la carte d’assuré social
Critères médicaux et critères administratifs
Critères médicaux | Critères administratifs |
---|---|
Colonne de gauche Désignation de la maladie |
Colonne centrale Délai de prise en charge : délai maximum entre l’arrêt de l’exposition et la première constatation des lésions Durée d ’exposition : parfois Colonne de droite Liste des travaux exposant Liste limitative ou indicative |
Les trois étapes de la procédure
PREMIÈRE ÉTAPE
Votre médecin rédige, en trois exemplaires, un certificat médical sur le formulaire 6 901, c'est le certificat médical initial précisant :
- La nature de la maladie professionnelle déclarée
- Les manifestations cliniques mentionnées aux tableaux et constatées à l'examen du patient
- Les suites médicales possibles
DEUXIÈME ÉTAPE
Vous envoyez à la Caisse Primaire d’Assurance Maladie la déclaration (imprimé 6 100.2) en trois exemplaires, dans les 2 ans, avec :
- Deux des trois certificats médicaux précédents
- Un résumé chronologique des postes de travail que vous avez occupé et le nom et l'adresse des entreprises correspondantes.
TROISIÈME ÉTAPE
Votre médecin établira le certificat médical de consolidation qui permet l'attribution d'un taux d'Incapacité Professionnelle Permanente (IPP).
En résumé, la procédure à respecter scrupuleusement !
- Désignation de la maladie
- Délai de prise en charge
- Liste des travaux exposant au risque
- Certificat médical rédigé avec précision, si possible en reprenant les termes du tableau
- Dans certains cas une durée d’exposition au risque est exigée
- Liste L = Limitative (fermée, c'est-à-dire le temps maximum depuis la fin de l’exposition)
- Liste I = Indicative (ouverte, c'est-à-dire sans limitation de durée)
La procédure, ensuite ...
QUELLE EST LA DURÉE DE LA PROCÉDURE ?
La Caisse de Sécurité Sociale doit, à compter de la réception de la déclaration, donner sa réponse dans un délai de 3 mois qui peut être étendu à 6 mois, en cas de dossier difficile.
En l’absence de cette réponse, le caractère professionnel du cancer est automatiquement acquis (décret du 27 avril 1999).
QUE SE PASSE-T-IL EN CAS D’ACCEPTATION ?
D’un point de vue administratif…
Dans ce cas, la Caisse Primaire d’Assurance Maladie dont vous dépendez, vous délivre les volets de soins et avertit :
- L’inspection du travail (copie de la déclaration)
- Votre employeur
- Le médecin du travail de votre entreprise (décret du 29-04-99)
Elle réalise une double enquête à partir des éléments médicaux et des conditions de travail. Dans certains cas, la caisse soumet le dossier directement au CRRMP.
D’un point de vue financier…
Les avantages médico-sociaux d’une reconnaissance en maladie professionnelle indemnisable dans le cadre du Régime Général de la Sécurité Sociale, sont une prise en charge à 100 % des soins pour l’affection qui est alors financée par la branche Accident de Travail/Maladie Professionnelle de l’Assurance Maladie et des prestations en espèces. Les indemnités journalières pendant l’arrêt de travail sont de :
- 60 % salaire journalier de référence de J1 à J28 avec, en 2013, un maximum de 185,30 €/jour
- 80 % salaire à partir de J29 avec, en 2013, un maximum de 247,07 €:jour
- Lorsque l'arrêt de travail est supérieur à 3 mois, l'indemnité journalière peut être revalorisée en cas d'augmentation générale des salaires.
Une rente, selon taux d’incapacité permanente partielle (IPP), après consolidation est attribuée pour une IPP
- < 10 %, un petit capital vous est versé
- 10 à 50 %, le taux de la rente est donné par la formule suivante : IPP/2 x salaire de base
- > 50 %, le taux de la rente est donné par la formule suivante : [25 + (IPP – 50) x 1,5] x salaire de base.
QUE FAIRE EN CAS DE REJET DE LA DEMANDE ?
Les procédures de contestation varient selon les régimes de protection sociale, en particulier pour la fonction publique, où elles sont plus complexes.
Vous ou vos ayants droit ont un délai de deux mois pour faire appel. Au-delà du délai de deux mois, le dossier sera rejeté. Trois niveaux de recours sont alors possibles :
- La commission de recours amiable
- Le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale
- La Chambre Sociale de la Cour d’Appel
La procédure "hors tableau" - Art L461 (Code de la SS) via le CRRMP
QUI DOIT DÉCLARER ?
L'initiative de la déclaration vous revient et non à votre employeur.
QUELS SONT LES DOCUMENTS À FOURNIR ?
Les pièces nécessaires du dossier sont les suivantes :
- Une demande motivée de reconnaissance, signée par vous même ou vos ayants droit et un questionnaire normalisé (certificat médical initial…) rempli par le médecin de votre choix
- Un avis motivé du ou des médecins du travail de la (des) entreprise(s) où vous avez été employée, portant sur la maladie et la réalité de votre exposition à un risque professionnel présent dans cette (ces) entreprise(s) qui doit parvenir dans un délai de un mois à compter de la demande de la caisse
- Un rapport circonstancié de (ou des) vos employeur(s), décrivant chaque poste détenu depuis son entrée dans l'entreprise qui doit parvenir dans un délai de un mois à compter de la demande de la caisse
- Les conclusions des enquêtes contradictoires conduites par les caisses compétentes
- Le rapport établi par le Médecin Conseil de la CPAM sur la pathologie dont vous souffrez et ses causes probables, ainsi que le rapport d'évaluation de votre taux d'incapacité permanente (IPP)
QUELLE EST LA DURÉE DE LA PROCÉDURE ?
Une fois saisi, le CRRMP dispose de 4 mois pour rendre son avis, et de 2 mois supplémentaires lorsqu'il y a nécessité d'examen ou d'enquête complémentaires.
L'ensemble du dossier est rapporté devant le comité par le médecin conseil qui vous a examiné ou qui a statué sur son taux d'incapacité permanente.
Le comité doit entendre l'ingénieur conseil du service de prévention de la CRAM. Il a également toute latitude pour vous entendre et votre employeur, et peut s'entourer de tous les avis nécessaires, notamment celui de l'inspection du travail.
L'avis du comité est rendu à la CPAM qui doit le notifier aux personnes concernées, victime ou ayants droit et employeurs.
QUE FAIRE EN CAS DE REJET DE LA DEMANDE ?
Les procédures de contestation varient selon les régimes de protection sociale, en particulier pour la fonction publique, où elles sont plus complexes.
D’une façon générale, vous ou vos ayants droit ont un délai de deux mois pour faire appel. Au-delà du délai de deux mois, le dossier sera rejeté.
Trois niveaux de recours sont alors possibles :
- La commission de recours amiable
- Le Tribunal des Affaires de Sécurité Sociale,
- La Chambre Sociale de la Cour d’Appel
LA SURVEILLANCE MÉDICALE POST-PROFESSIONNELLE
CAS GÉNÉRAL
Le décret du 26/03/1993 (arrêté du 28/02/1995)
Il institue une surveillance médicale dite « post-professionnelle ». Il prévoit une surveillance médicale spécifique gratuite ainsi que des examens complémentaires (radiographies, scanners...) tous les deux ans, ce afin de dépister précocement un éventuel cancer.
En pratique...
Il vous est délivré une attestation d’exposition à un agent cancérogène, signée par le médecin du travail et le chef d’entreprise.
Votre dossier médical est communiqué au médecin traitant.
CAS DE L'AMIANTE
On distingue les patients selon le niveau d’exposition à l’amiante, car les risques de développer un mésothéliome augmentent avec l'importance de l'exposition.
Les patients considérés comme ayant été fortement exposés, appartiennent aux métiers suivants : les mineurs d'amiante à l'étranger et les travailleurs de l'industrie navale en France.
Les patients considérés comme ayant été moins exposés, sont, par exemple, les travailleurs du bâtiment en contact avec des gaines.
En France, différentes mesures de surveillance régulière de patients exposés à l'amiante existent. Vous pourrez en prendre connaissance sur le site Internet : la conférence de consensus « Élaboration d'une stratégie de surveillance médicale clinique des personnes exposées à l'amiante.
L'EXEMPLE HELVÉTIQUE...
Les caractéristiques du suivi post-professionnel suisse sont présentées dans le tableau ci-dessous, à titre d'exemple.
Surveillance médicale professionnelle en cas d'exposition à un cancérogène
Cancérogène | Cancers | Fréquence des examens / Durée du suivi |
---|---|---|
Benzène | Leucémie | Chaque année jusqu'à 75 ans Selon le souhait du patient au-delà |
Amiante | Poumon | Tous les 5 ans pendant les 15 premières années suivant le début de l’exposition Tous les 2 ans jusqu’à l’âge de 75 ans Selon le souhait du patient après 75 ans |
Amines aromatiques | Vessie | Chaque année tout au long de la vie |
Goudron, poix, hydrocarbures aromatiques polycycliques |
Peau | Tous les 5 ans pendant les 15 premières années suivant le début de l’exposition Tous les 2 ans, tout le reste de la vie |
Chlorure de vinyle | Foie | Tous les 2 ans jusqu'à 75 ans Selon le souhait du patient au-delà |
Mise à jour
11 mai 2020