Chirurgie
Quelles options s'offrent au chirurgien ?
La possibilité de vous opérer dépend du bilan général et de l'avis de l'anesthésiste. L’extension locale de la tumeur et l'existence ou non de métastases (M) conditionnent les possibilité de réaliser une intervention chirurgicale.
Si le bilan à conclu à l'absence de métastase (M0), une résection première sera l'option retenue, sauf s'il existe un envahissement local empêchant une résection en bloc de la tumeur. Selon le type du cancer et des organes et structures envahies, un traitement préopératoire dit "néoadjuvant ou premier" de chimiothérapie pourra être proposé pour rendre résécable la tumeur par le chirurgien.
Si le bilan à conclu à l'existence d'une métastase (M1), une chimiothérapie première sera recommandée. Il n'y a, alors, pas d’indication à un traitement initial du cancer primitif sauf si la tumeur primitive est symptomatique et/ou compliquée, comme, par exemple une hémorragie, une occlusion, une perforation, un abcès péri-tumoral ou une distension colique en amont de la tumeur primitive.
Si le bilan à conclu à une métastase (M1) résécable, l'intervention aura comme objectif d'enlever la tumeur primitive et les métastases en un ou plusieurs temps en fonction des symptômes et des localisations. Le traitement chirurgical sera suivi d'une chimiothérapie adjuvante de type FOLFOX4.
LES TECHNIQUES chirurgicales
LES COLECTOMIES SEGMENTAIRES
Elles ne sont indiquées que pour les petites tumeurs et consistent à retirer le segment du côlon touché. Dans ce cas, le chirurgien enlève :
- Le segment où siège la tumeur en sectionnant latéralement en tissus sains, 5 cm au moins de colon sain sus-jacent et 5 cm au moins de colon sous-jacent au pôle inférieur de la tumeur
- Le mésocolon en regard de la tumeur, contenant les deux premiers relais lymphatiques
La continuité colique est rétablie par anastomose colo-colique, termino-terminale ou latéro-latérale.
LES HEMICOLECTOMIES
- En cas de tumeur du côlon droit comprenant le cæcum, l'appendice, le côlon ascendant, l’angle colique droit : colectomie droite avec anastomose iléo-colique transverse + curage iléo-caeco-appendiculaire + colique supérieur droit
- En cas de tumeur du côlon transverse : colectomie droite étendue au transverse ou colectomie subtotale étendue jusqu'au côlon gauche non inclus (ou inclus laissant juste le sigmoïde) selon certaines équipes, notamment, si syndrome de Lynch ou même de manière systématique
- Si la lésion affecte l'angle colique gauche et côlon descendant : colectomie angulaire gauche avec anastomose colorectale ou colectomie subtotale. L'hémicolectomie gauche « vraie » avec anastomose colorectale n'est plus proposée aujourd'hui + curage mésentérique inférieur
- Si la tumeur affecte le côlon sigmoïde : une sigmoïdectomie avec anastomose colorectale
Au moins 12 ganglions lymphatiques de drainage mésentériques (mésentère = repli du péritoine = tissu entourant et maintenant le côlon) sont aussi enlevés durant l’intervention.
LES AUTRES TYPES DE COLECTOMIES
Elargie : en cas d’envahissement de tissus voisins, l’exérèse peut être étendue à la demande, à la paroi abdominale, au rein, à la vésicule biliaire, au pancréas, à l’estomac, au grêle. C’est ce que veut dire le terme élargi.
Subtotale : Le chirurgien enlève, en plus de la zone tumorale, tout le colon situé en amont de celle-ci. L’anastomose iléo-colique ou rectale qui lui fait suite a l’avantage d’être plus sure qu’une suture colo-colique.
Totale : dans ce cas, le chirurgien procède à l’ablation de la totalité du cadre colique, de la dernière anse iléale à la jonction recto-sigmoïdienne. La continuité est rétablie par anastomose iléo-rectale. Bien qu’impressionnante, cette intervention est relativement bien supportée. Son principal inconvénient est constitué par l'augmentation de la fréquence des selles.
LES TECHNIQUES COELIOSCOPIQUES
DE QUOI S'AGIT-IL ?
C’est une technique chirurgicale très utilisée maintenant car moins invasive que les méthodes traditionnelles. Elle peut, même réalisée en ambulatoire, dans certains cas.
Cette technique ne nécessite que de petites incisions par lesquelles le chirurgien, après gonfler la cavité abdominale avec du gaz et introduit dans l’abdomen un laparoscope muni d'une caméra, et effectue la chirurgie avec de petits instruments passés dans le tube. Par cette technique, le chirurgien peut enlever le côlon ainsi que les ganglions adjacents. Elle peut être réalisée avec un robot.
LES INDICATIONS ACTUELLES…
Cette méthode tend à se généraliser car la plupart des études ont montré une équivalence entre les techniques traditionnelles et les techniques coelioscopiques, même pour les formes compliquées. Ses avantages sont de diminuer la taille de la cicatrice et les douleurs dans les suites de l'opération ainsi que de réduire la durée d'hospitalisation (voire chirurgie ambulatoire).
La chirurgie du cancer du rectum
UN CONTEXTE PARTICULIER
Le cancer du rectum présente un risque plus élevé de récidive locale (pelvienne) en raison du peu d’espace libre dans le petit-bassin ce qui complique l’ablation chirurgicale de tous les tissus cancéreux.
La conservation du sphincter anal est actuellement la règle. Cette possibilité sera discutée avec vous en tenant compte des résultats fonctionnels attendus et de la qualité de vie.
Comme la suture entre le côlon et l'anus est fragile, le chirurgien sera conduit à réaliser, le plus souvent, une stomie temporaire (anus artificiel temporaire) de dérivation (colostomie ou iléostomie). La continuité sera faite huit semaines plus tard, en l'absence complications.
LES OPÉRATIONS POSSIBLES
Les techniques cœlioscopies sont privilégiées. Plusieurs techniques chirurgicales peuvent être employées pour retirer la tumeur et les éventuels ganglions adjacents.
Actuellement, la conservation des nerfs pelviens est possible dans la majorité des cas ce qui permet de préserver les fonctions urinaires et sexuelles. Le siège de la tumeur conditionne le type de chirurgie...
- Haut rectum : exérèse du rectum et du mésorectum jusqu'à 5 cm sous le pôle inférieur de la lésion, anastomose colorectale mécanique ou manuelle a priori non protégé (stomie non systématique)
- Moyen/bas rectum : exérèse complète du mésorectum, rétablissement de continuité par anastomose colo-anale protégée (stomie de protection). L'adjonction d'un réservoir colique en J de 5 à 6 cm de longueur est recommandée. Si la confection d’un réservoir est impossible, une anastomose latéro-terminale est nécessaire.
- Très bas rectum : Exérèse complète du rectum et du mésorectum. Si une marge distale macroscopique de 1 cm au moins et une marge latérale suffisante sont obtenues d'emblée ou après dissection entre des les deux sphincters de l'anus, une anastomose colo-anale protégée avec réservoir colique est réalisée. Si la tumeur envahit le muscle strié (sphincter externe ou releveur) ou si une marge de 5 mm avec les muscles striés ne peut pas être obtenue, il faut procéder à une amputation abdomino-périnéale en dehors des muscles releveurs de l'anus (extra-lévatorienne). Une stomie de protection est nécessaire.
La résection de la tumeur par voie transanale utilise les voies naturelles, l’anus, pour retirer la tumeur. Elle ne s’adresse qu’aux petites tumeurs superficielles.
Les autres techniques
Il s’agit des techniques utilisant la coagulation soit par méthode traditionnelle, soit par laser. Elles sont utilisées pour améliorer les symptômes.
Dans certains cas, un stent, qui est une sorte de tuyau en plastique ou en métal, peut être inséré dans le rectum pour améliorer les symptômes.
L’exérèse des métastases hépatiques
LES TECHNIQUES
Une chirurgie est réalisable lorsque la résection de toutes les métastases parait possible sans exérèse hépatique majeure. Le meilleur cas est constitué par une métastase unique ou de petite taille. Dans ce cas, le chirurgien peut opter pour l’une des opérations suivantes :
- La métastasectomie emporte la métastase et une collerette de tissu hépatique sain
- Un segmentectomie réglée, qui enlève un segment du foie,
- Une lobectomie gauche ou droite
Ces exérèses peuvent être réalisées dans le même temps opératoire que la colectomie ou différée de 2 à 3 mois après réalisation d'une chimiothérapie.
LES TRAITEMENTS COMPLÉMENTAIRES
La chirurgie est associée à une chimiothérapie de type FOLFOX 4 simplifié qui comprend 6 cures préopératoires et 6 cures postopératoires.
Avant l’opération …
L'IMMUNO-NUTRITION
Mise en œuvre avant l'intervention, elle est maintenant proposée en routine car elle diminue les complications de la chirurgie. On vous prescrira, une semaine avant l'opération des "briques" de type Impact™ (340 kcal/ brique) contenant :
- Arginine: stimulation fonctions immunitaires, favorisation cicatrisation,
- Acides gras oméga 3: diminution réponse inflammatoire
- Nucléotides: stimulation prolifération cellulaire notamment intestinale et des cellules immunitaires
Cette immuno-nutrition sera poursuivie au moins une semaine après l'opération
LA PREPARATION COLIQUE PRE-OPERATOIRE
La préparation du côlon n'est plus appliquée pour la chirurgie du côlon. Elle est nécessaire pour la chirurgie du rectum.
L'ALIMENTATION
Chez les patients sans risque de régurgitation, la durée du jeûne préopératoire avant une chirurgie programmée n’excède pas 2 à 3 heures pour les liquides « clairs » et 6 heures pour un repas léger.
Chez les patients sans risque de régurgitation, la prise de liquides clairs sucrés sous forme de solution de glucose ou de maltodextrines jusqu’à 2 heures avant la prémédication est possible. Une charge en sucre réduit la soif, faim et l’anxiété préopératoire, l’insulinorésistance et la protéolyse postopératoire avec des suites et séjour plus courts.
EN PRATIQUE
Consultation avec le chirurgien et l’anesthésiste
Réunion de concertation pluri-disciplinaire (RCP)
Préparation du côlon (lavements) uniquement pour le cancer du rectum - souvent prise d’antibiotiques pour détruire les bactéries à l’intérieur du côlon
Intervention
Aurais-je une poche ? Dans la majorité des cas : NON !
C'EST LA QUESTION QUI VOUS TARAUDE...
Définissons les termes
Une colostomie, temporaire ou permanente, est une opération qui consiste à créer un anus artificiel. Le chirurgien relie l’extrémité du côlon à une ouverture pratiquée dans la paroi de l’abdomen. Cet orifice est appelé colostomie. S’il s’agit de l’intestin grêle, on parle alors d’iléostomie.
Les selles et les gaz sont alors évacués par la stomie et recueillies dans une poche externe appelée poche de colostomie.
Les colostomies définitives sont beaucoup plus rares de nos jours...
Une colostomie est réalisée pour environ 30 % des patients mais elle est le plus souvent temporaire. Une colostomie permanente avec suppression de l'anus n'est nécessaire que dans moins de 10 % des cas, essentiellement en cas de cancer du rectum.
L'ILÉOSTOMIE OU COLOSTOMIE TEMPORAIRE
Elle est parfois nécessaire pour permettre une bonne cicatrisation, surtout si vous êtes opéré à l’occasion d’une complication, comme une occlusion ou un abcès ou si le colon n’a pu être préparé car, dans ces cas, le risque de fistule après suture digestive est majoré.
Le chirurgien met en repos une partie du côlon en créant une iléostomie temporaire dite de protection qui consiste à créer un anus artificiel avec la partie terminale de l'intestin grêle, l'iléon. Son rôle est d'éviter le passage des matières au niveau de la suture colique.
Six à huit semaines plus tard, la continuité sera rétablie au cours d’une seconde courte intervention.
Du fait du caractère liquide des selles, il est généralement nécessaire de suivre un régime alimentaire pauvre en fibres et de consommer plus d'un litre de boisson par jour pour compenser les pertes.
LA COLOSTOMIE DÉFINITIVE
Elle peut être nécessaire en cas de localisation rectale lorsque le chirurgien doit enlever le sphincter anal. Elle est essentiellement la conséquence de tumeurs du rectum très basses. Dans ce cas, l’anastomose ne peut pas être réalisée car il n’y a pas assez de tissu rectal restant pour joindre les deux extrémités l’une à l’autre car pour le succès du traitement le chirurgien doit avoir au moins 2 cm de tissu sain pour effectuer l’anastomose.
LES DIFFÉRENTS TYPES
La qualité des selles évacuées par la colostomie est fonction du siège de celle-ci. L’appareillage proposé tiendra compte de la consistance des selles comme l’indique les schémas.
Les colostomies à la suite d’une chirurgie du côlon droit ou du côlon transverse
Elles sont le plus souvent temporaires. Il s'agit d'iléostomies réalisées en canon de fusil ou sur baguette. A ce niveau, les selles sont encore liquides ou semi liquides et l’appareillage de la colostomie est plus délicat. Elle est schématisée par la figure de gauche.
Les colostomies basses
Elles sont plus faciles à appareiller car les selles sont solides. Il faut savoir que l’orifice de colostomie est parcouru de nombreux vaisseaux sanguins et peut saigner facilement s’il est irrité. Des soins doivent être pratiqués non seulement sur la colostomie mais également sur la peau qui l’entoure. La figure de gauche schématise l’opération.
Après l’intervention
LA SALLE DE RÉVEIL
Quand vous vous réveillez de l’opération, vous êtes placé en salle de réveil où vous restez jusqu’au réveil en vérifiant que vos signes vitaux, tension artérielle, pouls et respiration sont stables. Vous rentrerez le soir dans votre chambre.
Avec les techniques modernes, il n'y a plus de drain. De plus il n'y a ni de de sonde naso-gastrique. La sonde urinaire n'est en place que pour 24 heures.
LES AUTRES ASPECTS
On vous lèvera au bout de 24 heures.
On instituera un traitement anticoagulant (héparine sous cutanée, en général) pendant au moins un mois pour prévenir les phlébites.
Vous serez alimenté par la bouche dès le premier jour.
LA DURÉE DE L'HOSPITALISATION
En l'absence de toute complication, la durée d’hospitalisation est d'environ 3 à 4 jours mais elle va dépendre de l'acte chirurgical pratiqué, de votre état général, de la présence d'autres problèmes médicaux, de votre réaction pendant la chirurgie et de votre état en postopératoire.
Dans certains cas sélectionnés, il peut s'agir de chirurgie ambulatoire.
Mise à jour
23 mars 2023