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Cancer de la verge (pénis)

L'incidence des tumeurs du pénis est variable selon les pays...

ÉPIDÉMIOLOGIE

Dans le monde, en 2022, on dénombrait 38 000 cas associés à 14 000 décès (GLOBOSCAN ESTIMATION 2022).
C'est un cancer très rare en Europe mais dont l'incidence est en forte augmentation. En France, l'incidence est estimée à 1 cas pour 100 000 hommes, soit environ 500 cas par an.
Il survient généralement à la soixantaine avec un maximum vers 80 ans (âge médian 71 ans).
Environ 90 % des tumeurs apparaissent au niveau du gland et/ou du prépuce. Les tumeurs primitives du corps pénien sont beaucoup plus rares. Les tumeurs secondaires, localisées aux corps caverneux, témoignent, elles, d’une maladie systémique.

LES FACTEURS DE RISQUE

Le phimosis
Le cancer de la verge survient essentiellement chez les sujets n'ayant pas subi de circoncision et pour lesquels une hygiène locale n'est pas suffisante. 
Un phimosis est associé dans 25 à 75 % des cancers de verge. 
Le rôle carcinogène d’une irritation chronique par le smegma est évoqué. Le smegma, sécrétion préputiale blanchâtre, est secrété par les glandes sébacées situées sur la surface interne du prépuce et sert à nettoyer et lubrifier le gland.

Les maladies sexuellement transmissibles (MST)
Elles représentent un facteur de risque reconnu, en particulier les infections par l'herpès virus.
Les infections à Papillomavirus (HPV), surtout du type 16 et 18 (oncogènes), favorisent la survenue de la maladie et sont retrouvées dans plus de la moitié des cas.

Les autres facteurs
Le tabac et la photo-chimiothérapie avec utilisation de psoralène et d’ultraviolet A ont été incriminés.

LES FORMES DE LA MALADIE

Sur le plan histologique
Le carcinome in situ est appelé érythroplasie de Queyrat*, s’il siège sur le gland, le prépuce ou le corps de la verge et, maladie de Bowen**, s’il touche sur le reste des organes génitaux ou sur le périnée (du latin : perineum, autour des voies évacuatrices).
Dans 95 % des cas, il s’agit de lésions épidermoïdes. Il existe sous deux formes de lésion :

  • Papillaire exophytique (lésion qui prolifère vers l'extérieur) qui a une évolution ganglionnaire tardive et rare
  • Ulcéro-infiltrante qui est rapidement associée à une atteinte ganglionnaire dont le pronostic est plus péjoratif
     

 Les autres formes sont des tumeurs basocellulaires, des mélanomes, des sarcomes, une maladie de Kaposi ou des métastases d’autres tumeurs.

Le siège de la tumeur
La majorité des carcinomes épidermoïdes ont un point de départ au niveau du gland.
Plus rarement, dans environ 20 % des cas, il affecte le prépuce et encore plus rarement, la couronne ou les corps caverneux.

 

 

* Louis Queyrat : dermatologue français (1856-1933)
** carcinome épidermoïde cutané in situ intra-épithélial, donc sans potentiel métastatique. 

Les états précancéreux

Les conditions précancéreuses sont ainsi dénommées car elles sont souvent associées à un cancer

Le lichen scléo-atrophique
Se présente cliniquement sous l'aspect de papules irrégulières blanchâtres et fermes regroupées en plaques entourées d'une aréole rosée ou pigmentée. Les lésions évoluent vers une atrophie et peuvent entraîner un phimosis ou une sténose du méat. Elles siègent le plus souvent sur le gland et le prépuce.

Les condylomes vénériens
Ce sont des lésions infectieuses, bénignes, contagieuses et récidivantes. L'agent viral responsable est le papillomavirus (HPV), le plus souvent des sérotypes HPV 6 et 11 mais les sérotypes oncogènes 16, 18, 31 et 33 peuvent être mis en évidence dans les condylomes avec dysplasie. Rappelons que chez l'homme,  la vaccination anti-HPV est très efficace pour prévenir l'apparition de ce cancer car l'HPV est un facteur de risque majeur pour le cancer du pénis!

Des lésions précancéreuses
Ces lésions peuvent évoluer vers un cancer invasif en l'absence de traitement. Il s'agit des dysplasies et des différentes formes de carcinome in situ.
L'érythroplasie de Queyrat : c'est une plaque bien limitée rosâtre, lisse, unique des muqueuses du gland et du prépuce; Elle évolue dans 33% des cas vers un cancer.
La maladie de Bowen : plaque bien limitée squameuse ou croûteuse, unique, pouvant atteindre la peau de la verge. 10 % des sujets développent
Ces deux formes cliniques surviennent vers l'âge de 50 à 60 ans.

Prévenir ...

Par la vaccination contre le HPV, en réduisant le risque d'infection par les types de HPV associés au cancer du pénis.
Une bonne hygiène, notamment pour les hommes non circoncis, est importante.
Réduire ou arrêter de fumer peut diminuer le risque.

Le diagnostic

LES SIGNES

Les symptômes du cancer du pénis peuvent inclure :

  • Une masse ou une ulcération sur le pénis, souvent sur le gland ou le prépuce.
  • Une modification de l'aspect de la peau du pénis.
  • Des douleurs au niveau du pénis ou le long de l'urètre.
  • Un écoulement inhabituel ou rarement un saignement.
  • Des ganglions lymphatiques dans l'aine.


LE BILAN

A l'examen, le spécialiste constate l'existence, dans deux tiers des cas, d'une tumeur du gland ou du sillon balano-préputial qui se présente  souvent sous la forme d’une tâche érythémateuse qui s’ulcère.
Le diagnostic de certitude est anatomo-pathologique après réalisation d'une circoncision large. Outre l'examen clinique, une IRM pénienne permettent d'apprécier l'extension en profondeur.

La staditification TNM de 2017

LE CONTEXTE

Il s'agit d'un cancer très lymphophile qui peut toucher rapidement les ganglions superficiels et profonds, de l’aine (triangle de Scarpa*), puis les ganglions iliaques. A distance, les métastases sont volontiers pulmonaires ou hépatiques.

LES VALEURS DE T,N,M

 

Tumeur T Ganglions N Métastases M

T0 pas de tumeur palpée
Tis in situ
Ta : verruqueux non infiltrant
T1 : envahissant le tissu conjonctif sous-épithélial 
- T1a grade 1-2 sans invasion lymphovasculaire
- T1b Grade 3-4 ou invasion lymphovasculaire
T2 : envahissant le corps spongieux ou caverneux
T3 : envahissant l’urètre
T4 : envahissant d’autres structures adjacentes

Grade G

G1 : bien différencié
G2 : moyennement différencié
G3 : faiblement différencié
G4 : indifférencié

N0 Pas de ganglion inguinal palpé
N1 Palpation d’un seul ganglion unilatéral mobile
N2 Palpation de ganglions multiples ou bilatéraux mobiles
N3 Ganglions inguinaux fixés ou ganglions pelviens, unilatéraux ou bilatéraux

M0 Pas de métastase à distance
M1 Métastases à distance


 

L'UICC 2017 décrit 4 stades, définis en fonction de la taille de la tumeur.

 

Stade

T

N

0is

Tis

N0

0a

Ta

I

(tumeur limitée au gland ou au prépuce)

T1a

IIA

IIB

(infiltration des corps caverneux)

T1b – T2

T3

IIIA

IIIB

( présence d'adénopathies métastatiques)

T1-3

T1-3

N1

N2

IV

(métastases viscérales)

T4

Tout T

Tout T

Tout N

N3

Tout N

 

* Antonio Scarpa (1752 – 1832) chirurgien et anatomiste italien

Les traitements

LA CHIRURGIE

Le traitement local doit être agressif car, au début, le cancer de la verge est essentiellement une maladie locale.
Les techniques proposées varient d'une simple circoncision avec examen extemporané péri-tumoral jusqu'à l'amputation totale de verge en passant par l'amputation partielle (glandectomie).
Une urétérostomie périnéale est donc parfois nécessaire.
Une lymphadénectomie inguinale et/ou iliaque (curage ganglionnaire) est nécessaire en cas de localisations ganglionnaires.

LA CURIETHÉRAPIE

La curiethérapie est une option validée pour les cancers de stade T1b ou T2.
Elle est précédée, 10 à 14 jours par une circoncision large, réalisée idéalement dans le même temps que la procédure du ganglion sentinelle.
Le traitement est fait en débit de dose pulsé ou en bas débit de dose (fils d’iridium), plus rarement en haut débit de dose. La prescription est de 60 à 65 Gy dans le volume cible et le débit de dose est de 0,4 à 0,6 Gy/h.
L’implantation est réalisée après cicatrisation de la circoncision, sous anesthésie générale ou péridurale et comporte :

  • La mise en place d’une sonde urinaire
  • L'implantation d’aiguilles interstitielles (espacement idéal de 12 à 18 mm),
     

LES AUTRES OPTIONS

La radiothérapie externe (RTE) peut être une option.
La chimiothérapie est, quant à elle, surtout utilisée en cas de dissémination de la maladie : adénopathie(s) fixée(s) ou métastase(s).

Le traitement SELON LE STADE

Tis - Ta - T1, N0, M0

Certaines tumeurs de stade pTis ou pTa peuvent être traitées localement par des crèmes cytotoxiques (5-fluoro-uracile ; imiquimod 5 %). Pour ces lésions, un traitement par laser est envisageable. 
Les indications de radiothérapie portent principalement sur la curiethérapie des tumeurs limitées au gland en traitement exclusif.
Le curage ganglionnaire n'est pas systématique.

T2 -T3, N0, M0

Le traitement de la tumeur primitive comporte une amputation de verge. Selon l'importance de l’atteinte des corps caverneux, l'amputation peut être partielle ou totale avec uréthrostomie périnéale. Un curage ganglionnaire superficiel bilatéral est systématique.
La curiethérapie interstitielle par fils d’iridium 192 est une option possible.

Tout T,N+,M0

Si les ganglions, N1-N2, ne sont pas fixés, le traitement implique un curage superficiel bilatéral et profond est l'option habituelle.
Si les ganglions, N1-N2, sont fixés, une chimiothérapie 5-FU + cisplatine +/- bléomycine est une option.
L'alternative est une irradiation de 55-60 grays.

Le suivi

Habituellement, les visites de suivi sont d'abord semestrielles puis la fréquence diminue avec le temps.
La durée du suivi est dans tous les cas de 5 ans minimum car 90 % des récidives sont dans les 5 premières années dont 75 % dans les 2 premières années.

Un relativement bon pronostic

Le taux de survie à 5 ans selon les dernières statistiques publiées est 68 %. A 10 ans, ce taux varie selon l'âge et est de l'ordre de 60 %.
Aux stades initiaux, T1 et T2, le taux de malades en vie, à 5 ans, est de 70 à 90 % en revanche aux stades avancés de la maladie, T3, le pourcentage de malades en vie, à 3 ans, est de 30 %.

Mise à jour

12 novembre 2023