Selon le type de tumeur
Les tumeurs n'infiltrant pas le muscle de la vessie (TVNIM)
UNE PATHOLOGIE PARTICULIERE
Les TVNIM sont classées en trois groupes pronostiques par le CCAFU (Comité de Cancérologie de l’Association Française d’Urologie), suivant le nombre, la taille, le degré d’infiltration pariétale et le grade, en risque faible, intermédiaire et haut.
L’évolution des TVNIM est d’abord dominé par le risque de récidive locale de la tumeur. Il est, à 3 ans, de 50 % pour une tumeur de bas grade et de 80 % pour une tumeur de haut grade. Les taux de progression sont, par ailleurs, directement liés au groupe pronostique.
LA RÉSECTION TRANS-URÈTRO-VÉSICALE (RTUV)
L'intervention
C'est une le traitement standard qui consiste en une ablation de la tumeur par les voies naturelles. Cette technique est possible à ce stade car la tumeur n’atteint pas le muscle et l’urologue peut, sans risque, découper la tumeur en la débordant sans perforer la vessie.
La plupart des urologues, et ceci qu'elle que soit le type de tumeur, font une instillation de chimiothérapie qui a comme intérêt de diminuer le risque de récidive.
Cette intervention sera associée ou non à une chimiothérapie ou à une immunothérapie intravésicale selon la classification de la tumeur et donc du risque d’évolution et/ou de récidive.
Les indications thérapeutiques
Pour les tumeurs à faible risque "Ta" unique, de grade histologique G1 ou G2, le traitement standard est une simple RTUV.
Pour les tumeurs à risque intermédiaire, une RTUV, suivie d'instillations vésicales est souvent proposée. L'indication des instillations vésicales adjuvantes sera d'autant plus plus formelle que la tumeur a tendance à récidiver. On peut alors vous proposer soit le BCG ou l'amétycine ou une chimiothérapie. Cela s'applique aux tumeurs suivantes : Ta multifocale, de grade G1 ou G2 récidivante ou unifocale de grade G3 et T1 de grade G2.
Pour les tumeurs à haut risque (tumeurs T1 de grade G3, le CIS ou les tumeurs T1 multifocales, récidivantes), une RTUV suivie d'instillations, le plus souvent de BCG, est l'option habituelle. Dans ce cas, une réévaluation, avec biopsie à 3 ou 6 mois sera réalisée pour s’assurer qu’il n’y a pas de tumeur résiduelle. S’il persiste une tumeur résiduelle (récidive précoce), le traitement conservateur ne pourra plus être préconisé.
LE TRAITEMENT RADICAL
Elle consiste en une cystectomie enlevant toute la vessie plus la prostate chez l’homme, plus l’utérus et la paroi antérieure du vagin chez la femme. L'ablation de la vessie ou cystectomie, peut être justifiée pour traiter efficacement certaines tumeurs superficielles dans les cas suivants :
- Une tumeur à haut risque T1/G3 qui récidive précocement
- Un carcinome in situ (CIS) récidivant ou entraînant une intolérance vésicale voire une incontinence en raison vraisemblablement d’un envahissement diffus à toute la vessie qui n’arrive plus à se dilater par contraction permanente musculaire (réaction inflammatoire)
- Des tumeurs à faible risque Ta G1-G2 mais multiples qui récidivent fréquemment (polypose diffuse récidivante) car il arrive un moment où on ne peut plus faire de résection. Cela correspond, 5 % des cystectomies radicales pour tumeurs de la vessie.
LES RÉSULTATS ATTENDUS…
Le nombre de patients en vie à 5 ans après traitement est proche de 90 %.
Le taux de réponse après BCG est de 70 à 100 % en cas de carcinome in-situ et de 80 à 90 % pour les autres tumeurs superficielles. Les patients ayant un carcinome in-situ qui répond au traitement par le BCG ont un risque de progression à 5 ans d’environ 20 %, tandis que les patients avec une réponse incomplète ont un risque de progression d’environ 95 %.
Les recommandations actuelles pour les traitements des TVNIM*
Les tumeurs de faible risque
Ce sont les tumeurs pTa de bas grade, unifocales et de moins de 3 cm sans antécédent de tumeur vésicales..
Elles ont un risque de récidive et de progression qui est faible.
Après la résection de ces tumeurs, aucun autre traitement complémentaire n’est nécessaire.
Les tumeurs de risque intermédiaire
Elles correspondent à toutes les autres tumeurs urothéliales pTa de bas grade qui ne présentent aucun des critères de risque élevé ou très élevé.
Ces tumeurs ont un risque de progression faible mais un risque de récidive élevé.
Leur traitement fait appel aux instillations endovésicales par chimiothérapie (mitomycine, épirubicine) comprenant 8 instillations vésicales sans traitement d’entretien.
L'autre option est les instillation de BCG avec un traitement d'entretien d'un an pour diminuer le risque de récidive. Le BCG est plus efficace sur le risque de récidive, mais son profil de tolérance étant moins bon.
Les tumeurs de haut risque
Elles possèdent au moins un des facteurs de risque : stade pT1, haut grade, présence de carcinome in situ (CIS). Le risque de récidive et de progression est élevé.
Leur traitement initial comprend 6 instillations endovésicales de BCG suivies par un traitement d’entretien de 3 ans, sauf problème de tolérance..
Les tumeurs de très haut risque
Il s’agit de tumeurs pT1 de haut grade avec CIS et des tumeurs non urothéliales ou présentant des formes agressives :
- Le risque de progression est élevé (20 %), car
- La probabilité d’éradication complète avant traitement est faible
- Elles sont très agressives
- Elles présentent un risque d’échec du traitement endovésical élevé
- Il existe un risque d’envahissement ganglionnaire dès le stade pT1.
La BCG-thérapie et la cystectomie associée à un curage ganglionnaire sont les deux options thérapeutiques de première intention.
@ * Référence UroFrance
En résumé pour les TVNIM
Tumeurs de bas grade et stade Ta (2/3 des cas) | Tumeurs de haut grade et stade T1 et/ou Cis |
---|---|
Taux de récidive : 50-60 % (surtout la première année) |
Récidive et progression > 50 % des cas |
Traitement adjuvant des TVNIM selon le niveau de risque (Association Européenne d’Urologie)....
Risque |
Définition |
Recommandations |
---|---|---|
Faible |
Tumeur unique à de faible grade, taille < 3 cm |
Instillations hebdomadaires de mitomycine 8 semaines consécutives après cicatrisation vésicale (4 à 6 semaines) |
Intermédiaire |
Toute tumeur n’appartenant ni aux tumeurs de faible risque, ni aux tumeurs de haut risque |
En cas de taux de récidive faible : chimiothérapie intravésicale immédiate |
Haut risque |
Tumeur T1 ou tumeur de haut grade ou carcinome in situ (CIS) |
Instillations endo-vésicales de BCG (sauf contre-indications) après cicatrisation vésicale (4 à 6 semaines). Si elles sont bien supportées, un traitement d’entretien est recommandé. |
Très haut risque |
Tumeur T1 de haut risque associée au carcinome in situ |
Cystectomie avec curage ganglionnaire |
Les tumeurs infiltrant le muscle de la vessie (TVIM)
LES TRAITEMENTS STANDARDS
Les interventions possibles
Le traitement de référence est la cysto-prostatectomie chez l’homme, ou la cysto-colpectomie antérieure associée ou non à une hystérectomie chez la femme. L''intervention est souhaitable dans les 3 mois suivants la résection diagnostique. Elle est pratiquée de manière traditionnelle ou par voie laparoscopique ou robot-assistée.
La chirurgie sera précédée, si possible, d'une chimiothérapie néo-adjuvante comportant un sel de platine.
Le curage ganglionnaire
Avant d’effectuer la cystectomie, le chirurgien explore et enlève les chaînes ganglionnaires. S'il existe une infiltration importante des chaînes ganglionnaires, le pronostic est plus réservé. On peut vous proposer deux options : une cystectomie associée à une radio-chimiothérapie adjuvante ou un traitement radio-chimiothérapique de première intention, suivi ou non, d’une opération.
Lorsqu’il n’y a pas d’atteinte ganglionnaire ou qu’elle est limitée à un ou deux ganglions, le fait d’avoir enlevé les chaînes permet, après la cystectomie radicale, d’obtenir de bons résultats.
Les résultats
Lorsque la tumeur infiltre le muscle sans atteinte ganglionnaire (T2N0), le pronostic est bon. Les malades sont en vie à 5 ans dans 60 % des cas et dans 50 % des cas, à 10 ans.
A l'inverse, s’il y a une atteinte ganglionnaire ou s’il s’agit d’une tumeur "T3" qui a dépassé la paroi de la vessie, le taux de guérison est de l'ordre de 40 % à 5 ans.
LES TRAITEMENTS ALTERNATIFS
La chirurgie conservatrice : la cystectomie partielle
Elle passe au moins à 2 cm de la tumeur, quand elle siège soit au niveau de la calotte soit au niveau des faces latérales de la vessie (30 %), c’est-à-dire quand la tumeur ne siège pas au niveau du trigone ou de son abord (70 %). Elle permet de conserver une partie du réservoir qui reprendra avec le temps une capacité presque normale. Ceci, le cas échéant, peut permettre des cystectomies partielles itératives.
La diverticulectomie
C'est une technique chirurgicale qui s’applique aux tumeurs siégeant au niveau d’un diverticule vésical (sorte de petite hernie dans la paroi de la vessie) à la condition que le stade "T1" ne soit pas dépassé car il n’y a pas de muscle à son niveau.
Une tumeur intra-diverticulaire "T1" est traitée comme une tumeur "T2". Cette intervention se fait le plus souvent par voie abdominale par sécurité et permet, si nécessaire, un curage ganglionnaire.
La radiochimiothérapie
La radiothérapie isolée n’est plus utilisée de nos jours car moins efficace que la chirurgie.
La chimioradiothérapie concomitante est une alternative thérapeutique à une chirurgie radicale (cystectomie) dans l'optique de conserver la vessie ou lorsque l'intervention n'est possible..
Le protocole comporte une radiothérapie à la dose de 45 Gy et une chimiothérapie associant le cisplatine et le 5-FU. Des études sont en cours pour évaluer les taxanes et la gemcitabine comme alternatives.
A la fin du traitement un nouveau prélèvement histologique est réaliser pour vérifier la disparition de la tumeur. Si, en dépit de ces séquences, la tumeur n’a pas disparu, une cystectomie radicale vous sera proposée. Le traitement chirurgical sera suivi, à nouveau, de deux séquences de radiochimiothérapie.
LES FORMES MÉTASTATIQUES
Le contexte
Au moment du diagnostic, 25 % des tumeurs urothéliales infiltrent le muscle vésical et même si elles sont confinées à l’organe, 20 à 40 % des patients vont rechuter et 5 % sont métastatiques d’emblée.
En première ligne
Une chimiothérapie à base de cisplatine est recommandée chez les patients aptes à la tolérer, suivie d’un traitement d’entretien par une immunothérapie ciblée comme l'avélumab (Bavencio™).
L’association gemcitabine/carboplatine suivie d’un traitement d’entretien par une immunothérapie par l'avélumab est recommandée chez les patients non éligibles à un traitement à base de cisplatine.
L’atézolizumab (Tecentriq™) ou le pembrolizumab (Keytruda™), immunothérapies ciblées sont une option pour les patients présentant des tumeurs positives au biomarqueur du PDL1 qui ne sont pas éligibles à une chimiothérapie à base de cisplatine.
En deuxième ligne
Dans ce cas on peut vous proposer une monothérapie ou la vinflumine qui est un alcaloïde dérivé de la pervenche.
Une immunothérapie innovatrice
Cinq inhibiteurs des points de contrôle immunitaires sont homologués, dont le nivolumab (Opdivo™), atezolizumab (Tecentriq™) et le durvalumab (Imfinzi™) pour le traitement des cancers de la vessie en rechute. A terme, ces médicaments pourraient être préconisés en traitement adjuvant, voire néoadjuvant.
Ils disposent, en France d'une Autorisation Temporaire d'Utilisation (ATU) nominative.
Les effets indésirables décrits fréquents sont : fatigue, perte d’appétit, nausées, constipation. Vous serez informé ainsi que votre médecin traitant sur la survenue possible d’effets secondaires dys-immunitaires et nécessitant une prise en charge spécialisée.
LES SOINS POUR CONTRÔLER LA MALADIE
Si le cancer de la vessie n’est pas opérable, il est important de soulager les symptômes. Les tumeurs avancées étendues peuvent causer des mictions fréquentes, douloureuses et sanglantes de jour comme de nuit. Les tissus détruits à l’intérieur de la tumeur peuvent également être une source permanente d’infection.
La dérivation urinaire peut donc, chez de tels patients, éviter des souffrances et le manque de sommeil dus aux mictions permanentes et extrêmement douloureuses.
Le traitement tri-modal (TTM) pour préserver la vessie...
LE PRINCIPE DU TRAITEMENT TRI-MODAL
Il associe une résection endoscopique (RTUV) suivie d’une radiochimiothérapie. Concrètement :
- RTUV profonde et complète
- Suivie d’une radiothérapie externe privilégiant les techniques d’IMRT et d’IGRT
- Une chimiothérapie radio-sensibilisante concomitante, à base de cisplatine, 5-fluorouracile et Mitomycine C
Cette stratégie constitue une alternative à la cystectomie totale qui a été validée par des études qui ont montré des résultats comparables à la cystectomie totale..
Dans ces études, à 5 ans le taux de survie spécifique varierait de 50 à 84% et de 36 à 74% pour la survie globale. Le taux de cystectomie de rattrapage serait d’environ 15 %.
LES INDICATIONS POSSIBLES
Le TTM peut être proposé comme alternative chez un patient éligible à la chirurgie en cas de :
- Résection complète
- Au stade T2-T3 N0 M0
- En l’absence de CIS diffus, d’hydronéphrose, d’altération fonctionnelle majeure de la vessie (absence de pollakiurie, IPSS < 8)
- Chez un patient acceptant un suivi rigoureux ou qui est récusé pour la chirurgie.
En résumé, le traitement des TVIM...
- Cystectomie totale + curage ilio-obturateur (par voie laparoscopique si possible) + curage ganglionnaire extensif
- Chez l’homme + prostate/vésicules séminales ; chez la femme + utérus (le plus souvent)
- Néo-vessie
- Chez l'homme: entéro-cystoplastie en l’absence d’impossibilité anatomique et lorsque l'urètre n'est pas touché
- Chez la femme : vessie de remplacement si la tumeur n’envahit pas le col vésical
- Chimioradiothérapie concomitante dans l'optique de conserver la vessie ou lorsque l'intervention n'est possible.
Mise à jour
12 février 2024