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Selon le stade

Avant d'envisager un traitement...

TRAITER OU NE PAS TRAITER ?

La maladie dite des "trois tiers"

  • Dans un premier tiers des cas : la maladie se situe à un stade peu évolué et n’évoluera pas ou très peu - les malades n’auront jamais besoin de traitement.
  • Dans un second tiers des cas : la maladie se situe à un stade peu évolué, ne nécessitant pas de traitement dans l’immédiat, mais évoluera dans les années à venir et devra alors être traitée.
  • Dans un troisième tiers des cas : la maladie est évolutive au moment du diagnostic et requiert assez rapidement un traitement


TRAITER MAIS COMMENT ?

Un bilan sanguin très spécifique avant de sélectionner l'option de traitement est nécessaire pour sa bonne conduite et son efficacité optimale.

L’analyse « FISH », ou bien l’analyse de « Caryotype » 
L'analyse recherche des anomalies des chromosomes (tels que les délétions 13q, 11q, 17p, trisomie 12), qui sont un facteur prédictif de l'efficacité du traitement proposé. Par exemple, si une délétion du bras court du chromosome 17 (délétion 17p) est associée à une moindre efficacité d'une chimio-immunothérapie traditionnelle.

Statut mutationnel des IGHV (chaines lourdes des immunoglobulines)
Il s’agit d’un marqueur génétique. Il est un facteur pronostique important, notamment, pour prédire la vitesse de progression et aussi comme facteur prédictif de l'efficacité des traitements :

  • « IGHV muté » : c'est un facteur pronostique favorable (progression lente) et aussi un facteur prédictif de l'efficacité d'une chimio-immunothérapie en termes de rémission longue (on parle de rémissions très longues au delà de 10 ans)
  • « IGHV non-muté » : c'est facteur pronostique moins favorable (progression plus rapide) et ainsi qu'un facteur prédictif dans le sens que des thérapies ciblées ont de meilleures chances à procurer une rémission profonde et donc longue qu’une chimio-immunothérapie


Recherche d’une mutation TP53
Il s’agit d’un gène du bras court du chromosome 17 qui aide à limiter la prolifération des cancers. Si ce gène manque ou est muté (et alors est dysfonctionnel), des thérapies ciblées ont de meilleures chances à procurer une rémission profonde et donc longue qu’une chimio-immunothérapie.

Doit-on vous traiter ou vous surveiller ?

SELON LES CRITÈRES DU IWCLL 2018 DÉFINISSANT UNE MALADIE ACTIVE ?

Le traitement est indiqué, quel que soit le stade, selon les critères proposés en 2018 par l’IWCLL (Blood, 2018:131(25):2745-2760) dans les cas suivants :

  • Insuffisance médullaire (Hb < 10 g/dL et/ou plaquettes < 100 G/L)
  • Une splénomégalie massive (> 6 cm sous l’auvent costal) ou splénomégalie progressive ou symptomatique
  • Des adénopathies de grande taille (> 10 cm) ou des adénopathies progressives ou symptomatiques
  • Une progression rapide de la lymphocytose (> à 50 % en 2 mois ou temps de doublement < 6 mois) chez les patients ayant au moins un taux de lymphocytes de 30,109/L. 
  • Une anémie hémolytique auto-immune ou thrombopénie auto-immune ne répondant pas à un traitement standard
  • Une localisation extra-ganglionnaire symptomatique (ex. peau, rein, poumon, moelle épinière…)
  • La présence de signes généraux :
    • Perte de poids non volontaire de plus de 10 % dans les 6 derniers mois,
    • Fatigue significative : impossibilité de travailler ou de réaliser les activités usuelles,
    • Fièvre > 38 °C durant 2 semaines sans infection documentée,
    • Sueurs nocturnes pendant plus d’un mois sans infection documentée.


SELON L'INDEX PRONOSTIQUE ?

D’autres équipes utilisent les critères suivants :

  • Le stade évolutif de la maladie,
  • Votre âge,
  • L'existence, ou non, de facteurs de mauvais pronostic, comme : une trisomie 12,  une anomalie du chromosome 11, une délétion 17p (del17p), une mutation/délétion de TP53

Au stade A

L'ABSTENTION THÉRAPEUTIQUE ASSOCIÉE Á UNE SURVEILLANCE ÉTROITE

C’est une des options, si vous n’avez aucun symptôme de la maladie.
À ce stade de la maladie, la plupart des spécialistes recommandent de ne pas introduire de traitement surtout si on est en présence d'une forme sans symptômes. Les études ont montré l'absence de bénéfice d'un traitement à ce stade.
Tant que l'hématopoïèse normale est conservée, c'est à dire que le nombre absolu, de polynucléaires neutrophiles, de globules rouges et de plaquettes restent normal, il n'y a pas de bénéfice à introduire un traitement pour limiter l'expansion de l'hyperlymphocytose.
Cette attitude est justifiée par l'évolution lente de la maladie et par les travaux scientifiques qui ont montré que la médiane de survie est identique à celle de la population générale de même âge.

PLUS RAREMENT, UNE CHIMIOTHÉRAPIE

Si on observe un doublement de la lymphocytose dans la première année du diagnostic, il est raisonnable d'évoquer une tendance évolutive de la maladie. Le traitement par chlorambucil (Chloraminophène™) à la dose de 1 à 3 gélules par semaine est parfois proposée. Ce traitement peut être efficace rapidement sur la lymphocytose et permettre de la maintenir à un niveau normal ou proche de la normale.
L'inconvénient est que ce traitement peut induire des résistances aux traitements ultérieurs et diminuer les chances de contrôler la maladie lorsque survient la progression. De plus, une augmentation de la fréquence des cancers a été observée chez les patients traités par chlorambucil.

Au stade B et au-delà…

L'ABSTENTION THÉRAPEUTIQUE ASSOCIÉE À UNE SURVEILLANCE ÉTROITE

Si vous n’avez aucun symptôme de la maladie et que vous êtes âgé de plus de 75 ans, c’est une des options pour les patients au stade B car les études ont montré que moins de 15 % des malades évoluent vers le stade C en 5 ans.

LA STRATEGIE THERAPEUTIQUE

Elle dépend en premier lieu du statut de mutation du gène TP53, et en second lieu du statut IGHV et des comorbidités.

UN TRAITEMENT PAR IMMUNO-CHIMIOTHÉRAPIE

Le FCR (Fludarabine + Cyclophosphamide + Rituximab)
C'est le traitement de référence en première ligne chez les patients de moins de 75 ans. Le protocole de traitement comporte 6 cycles à 28 jours d’intervalle. Il est administré par voie intraveineuse aux doses suivantes : J1 à J3 fludarabine : 40 mg/m²/j et cyclophosphamide : 250 mg/m²/j (il existe une alternative par voie orale) et à J1 rituximab 375 mg/m² cycle 1 (C1) puis 500 mg/m² les cinq autres cycles (2 à 6).
Si vous avez plus de 75 ans et si vous êtes en bon état général, on vous proposera 4 cycles de FCR au lieu de 6. Dans certains cas, un traitement de maintenance par rituximab chez les patients à haut risque peut être proposé. 
Ce traitement permet d'obtenir 95 % de réponse thérapeutiques dont 70 % de réponses complètes et un allongement du temps sans rechute. 
La durée de rémission est supérieure à 4 ans. Le traitement augmente la survie, même chez les sujets âgés... Néanmoins, en pratique, seul environ 20 % des patients âgés de plus de 72 ans peuvent en bénéficier...

Les autres option selon votre état général
Si votre fonction rénale est altérée, une association rituximab-bendamustine (RB) est l'option alternative.
L'utilisation de la bendamustine seule se fait à la posologie de 90 mg/m²/j J1 et J2, six cycles à vingt-huit jours d’intervalle.
Si vous avez d'autres problèmes de santé (comorbidités), l’objectif du traitement est d'être le moins toxique possible et de garantir une bonne qualité de vie. Le chlorambucil seul est encore une option. Il peut être associé à une immunothérapie par le rituximab ou l’obinutuzumab.

LES THÉRAPIES NOUVELLES CIBLÉES PAR VOIE ORALE TENDENT A S'IMPOSER ACTUELLEMENT...

En dehors du fait qu'elles sont actives par voie orale, elles induisent une régression rapide du syndrome tumoral.

L'ibrutinib (Imbruvica™)
C'est un inhibiteur de la tyrosine kinase de Bruton (BTK) actif par voie orale. Il est homologué pour le traitement de la LLC ayant reçu au moins un traitement antérieur, ou en première ligne en cas de délétion 17p ou de mutation TP53 chez les patients pour lesquels une immunochimiothérapie est inadaptée. La dose est de 420 mg (3 gélules de 140 mg) 1 fois par jour. .

L’idélalisib (Zydélig™)
C'est un inhibiteur de la PI3K delta qui est une protéine qui est surexprimée dans de nombreuses tumeurs malignes à cellules B et qui joue un rôle dans la survie, la prolifération et la migration des cellules cancéreuses.
Il est homologué en association au rituximab dans le traitement de patients adultes atteints de leucémie lymphoïde chronique ayant reçu au moins un traitement antérieur, ou comme traitement de première intention chez les patients présentant une délétion 17p ou une mutation TP53 et pour lesquels une chimio-immunothérapie n'est pas appropriée.
La dose recommandée est de 150 mg, par voie orale, 2 fois par jour. Le traitement doit être poursuivi jusqu'à progression de la maladie ou apparition d'une toxicité inacceptable.

Le navitoclax (Venclyxto™)
C'est un inhibiteur des protéines de la famille BCL-x et BCL-w et induit fortement l'apoptose des cellules leucémiques.
Il est actif par voie orale.Il est homologué pour le traitement de certaines leucémies lymphoïdes chroniques.
La dose initiale est de 20 mg de vénétoclax une fois par jour pendant 7 jours qui est augmentée progressivement sur une période de 5 semaines jusqu’à la dose quotidienne de 400 mg.
Ce schéma de titration de dose sur 5 semaines est conçu pour diminuer progressivement la masse tumorale (réduction tumorale) et ainsi diminuer le risque de syndrome de lyse tumorale (SLT). Le traitement doit être poursuivi jusqu’à progression de la maladie ou intolérance.

EN CAS CE MUTATION del(17p)

Les traitements usuels sont peu efficaces pour cette forme. Face à cette situation, chez le sujet jeune, l'allogreffe de cellules souches hématopoïétiques est à envisager rapidement.

Traitements de 1ère ligne en fonction de l'existence ou non de del17p; mutation de p53

 

Le patient Sans del17p; mutation de p53 Avec del17p; mutation de p53
Bon état général

FCR (< 65 ans) 
Bedamustine + rituximab (> 65 ans)

Pas de chimiothérapie
Ibrutinib
Idelalisib plus rituximab
Venetoclax (contre-indications à l'ibrutinib)

État général précaire

Chlorambucil plus obinutuzumab
Chlorambucil plus ofatumumab
Chlorambucil plus rituximab
Ibrutinib en monothérapie

Ibrutinib
Idelalisib plus rituximab
Venetoclax (contre-indication à l’ibrutinib)

 

Évaluation de la réponse (critères NCI WG)

Elle repose sur les critères du NCI-WG (National Cancer Institute Working Group -WG) mesurés après deux mois de traitement :

  • Absence de ganglions
  • Absence d'hépatomégalie ou de splénomégalie
  • Une NFS normalisée :
  • Polynucléaires > 1,500
  • Plaquettes > l00 000
  • Hémoglobine > 11 g
  • Normalisation de la moelle osseuse
     

Depuis ces dernières années, l’évaluation de la maladie résiduelle est un objectif majeur dans la prise en charge thérapeutique de la LLC. Deux méthodes d’évaluation sont disponibles la cytométrie de flux et la technique par polymerase chain reaction (PCR).

En cas d'échec...

LES SECONDES LIGNES

Le traitement de seconde ligne dépend de l’âge et des problèmes médicaux associés ou comorbidités.
Le FCR (Fludarabine, Cyclophosphamide et Rituximab) est une option chez les patients n’ayant pas reçu un traitement antérieur par fludarabine et non réfractaires (absence de réponse ou progression dans les 6 mois qui suivent le traitement par fludarabine).
Les alternatives thérapeutiques, selon les centres, sont les protocoles suivants qui peuvent être proposés : l’association PCR (Pentostatine + Cyclophosphamide + Rituximab) ou le traitement par FluCam (Fludarabine + alemtuzumab)

 LES THÉRAPIES CIBLÉES

Elles représentent une avancée significative dans le traitement des LLC difficiles à traiter.
Les inhibiteurs de tyrosine kinase de la voie du récepteur B (BCRi), actifs par voie orale, sont une option raisonnable et validée. Le traitement par BRCi doit être poursuivi jusqu'à progression de la maladie ou apparition d'une toxicité inacceptable. L'ibrutinib ( Imbruvica™) est administré à la dose de  de 420 mg (3 gélules de 140 mg) 1 fois par jour.ou l'idélalisib (Zydélig™) est donné à la dose de 150 mg, par voie orale, 2 fois par jour. 

Traitements selon le cas

 

Caractéristiques Traitements standards Alternatives
Patients en bonne forme physique Ibrutinib pouvant être suivi d’une greffe de moelle allogéniques Idelalisib plus rituximab; venétoclax; lenalidomide
Patients faibles Chlorambucil +/- rituximab + prednisone Ibrutinib; idélalisib plus rituximab; venetoclax; lenalidomide; anti-CD20 (rituximab ou ofatumumab)
 Patients moins de 65 ans FCR : fludarabine, cyclophosphamide, rituximab  
Patients âgés

Bendamustine et rituximab
Ibrutinib supérieur au chlorambucil

 
Patients avec une anomalie de type del17p/TP53 ou non muté IGH Toutes les classes d'âge : iIbrutinib  
Rechute précoce, formes réfractaires ou progression dans les 3 ans

Alemtuzumab (+/- corticoïdes)
Aracytine haute dose et des sels de platine 
Allogreffe : les patients jeunes qui sont répondeurs

En l'absence de donneurs ou en cas de contre indication à l‟allogreffe, une autogreffe
Rechute précoce (avant 3 ans) après chimio-immunothérapie Thérapies ciblées : ibrutinib, idelalisib, venetoclax, ou duvelisib  
Rechute tardive (après 3 ans) ou intolérance à l'ibrutinib Reprise du traitement initial ou traitement par une thérapie ciblée Changer d’immunochimiothérapie; ibrutinib; idelalisib plus rituximab

Les greffes de moelle ont peu d'indications...

LES AUTOGREFFES

Les lymphocytes malins des formes évoluées de LLC sont sensibles aux chimiothérapies et que, plus la dose de chimiothérapie utilisée est forte, plus l'effet sur ces cellules est important.
En pratique, l'augmentation des doses de chimiothérapie se heurte à une augmentation de la toxicité, en particulier pour les cellules du sang. C'est pour permettre des traitements très intensifs que des intensifications thérapeutiques, avec autogreffe de cellules souches, ont été mises au point.
De nos jours cette technique est pratiquement abandonnée en première intention.

LES ALLOGREFFES

C’est actuellement le seul traitement potentiellement curateur mais elles ne concernent qu'une minorité de patients, répondant à certains critères, et sous conditions d’âge et de disponibilité d’un donneur compatible, familial ou non. Les critères définis par l’EBMT en 2019 sont :

  • Peut être proposée en cas d’évolution de la maladie sous inhibiteurs de tyrosine kinase de la voie du récepteur B (BCRi) et chez les patients répondeurs au vénétoclax chez les patients jeunes
  • Indiquée en cas de rechute malgré BCRi et vénétoclax
     

 Les mini-transplantations allogéniques sont souvent proposées, en seconde intention. Dans ce cas l’abrasion préalable de la moelle est beaucoup moins intense.

Le traitement associés

GLOBALEMENT

L’allopurinol médicament pour diminuer le taux d'acide urique, à la dose de 300 mg est débuté la veille du démarrage de tout traitement de LLC et pendant une dizaine de jours, ainsi qu’une bonne hydratation orale, de façon à prévenir le syndrome de lyse cellulaire.
En raison d'une diminution des lymphocytes T (lymphopénie) induite par la fludarabine, on vous prescrira un traitement prophylactique contre les infections virales dues aux virus du groupe herpes : herpes et zona par valaciclovir  (Zelitrex™ et génériques) 500 mg × 2/j pendant le traitement et plusieurs mois au-delà jusqu’à ce que les lymphocytes se normalisent. De plus, la plupart des centres préconisent une prophylaxie de la pneumocystose alvéolaire par une administration de Bactrim Fort™, trois fois par semaine.
La diminution fréquente des gamma globulines (hypogammaglobulinémie) est associée à un risque infectieux accru. Un traitement par gammaglobulines, si le taux de gammaglobulines est inférieur à 4 g/L ou en cas d'épisodes infectieux sévères sera mis en route.

LES COMPLICATIONS INFECTIEUSES

Ce sont les principales complications et la première cause de mortalité. Les principaux pathogènes en cause sont les Streptocoques et le Pneumocoque . Elles doivent être traitées et si possible prévenues par exemple par l'administration d'immunoglobulines intraveineuses polyvalentes pendant la période hivernale, à raison de 0,4 g/kg toutes les 3 semaines

LES CYTOPÉNIES AUTO-IMMUNES

Une anémie, une thrombopénie et/ou une neutropénie peuvent être liées à l'insuffisance de fonctionnement de la moelle osseuse, à une auto-immunité ou à un hypersplénisme (augmentation de la destruction des globules par la rate).
Les traitements des manifestations d'auto-immunité, comme un purpura thrombopénique se fait grâce à la corticothérapie continue en plus du traitement spécifique de la LLC.
En cas d'échec de la corticothérapie et/ou d'indication de traitement de la LLC, un traitement par rituximab (R) et/ou cyclophosphamide, R-mini CHOP, est une option validée.
Les immunoglobulines à forte dose, 0,4 g/kg pendant 3 jours par voie intraveineuse, peuvent permettre de passer un cap difficile.
La splénectomie (ablation chirurgicale de la rate) ou l'irradiation de la rate peut être indiquée en cas d'échec de la corticothérapie. La ciclosporine est utilisée pour traiter les érythroblastopénies.

Mise à jour

24 décembre 2023