Selon le stade
La chirurgie selon le type de cancer
PAPILLAIRE
Le "standard" la thyroïdectomie totale et curage ganglionnaire
Le groupe de CONSENSUS Français recommande une thyroïdectomie totale systématique. L'intervention est complétée par un curage ganglionnaire cervical homolatéral* (du même côté) : récurrentiel et sus-claviculaire systématique, jugulo-carotidien haut si le précédent est positif ou si il y a des adénopathies palpables dans cette région.
La lobectomie
Elle est maintenant recommandée, en dehors de la présence de nodules controlatéraux, pour le traitement du cancers thyroïdiens mesurant plus de 2 cm de diamètre ou lorsqu’il existe des adénopathies et pourra s’accompagner dans certains cas d’un curage ganglionnaire prophylactique ou thérapeutique.
L’isthmo lobectomie
Elle était uniquement recommandée pour les microcarcinome unifocaux, intrathyroïdiens de faible risque. Ses indications se sont étendues aux cancers mesurant moins de 4 cm de diamètre sans adénopathie ni signe d’extension extra-thyroïdienne.
VESICULAIRE
Dans le cas général
Le traitement de première intention est une thyroïdectomie totale, complétée par un traitement à l’iode 131 (totalisation isotopique) pour détruire d'éventuels reliquats tumoraux et en raison du plus grand risque de métastases à distance. Ce traitement adjuvant est effectué 4 à 6 semaines après l’opération.
Le curage ganglionnaire est effectué seulement en cas de découverte d’adénopathies suspectes durant l’opération. Le risque d’envahissement ganglionnaire est, pour ce type histologique, inférieur à 20 %.
Dans le cas d’une petite tumeur
La totalisation n'est plus systématique, en présence d’une tumeur T1 de moins de 20 mm, chez un sujet de moins de 45 ans, si le lobe controlatéral est échographiquement normal et s’il n’existe pas d’adénopathie à l’échographie.
* La région cervico-faciale regroupe proportionnellement la plus grande partie des ganglions du corps humain (400/700). Le système lymphatique cervical draine l'ensemble des territoires de la tête et du cou et, en particulier, les téguments et les voies aérodigestives supérieures (VADS). Il se compose de quatre voies lymphatiques: les voies sous-mento-sous-maxillaire, jugulaire, spinale et cervicale transverse.
Important, après la chirurgie...
- Les cancers bien différenciés conservent des propriétés de la cellule thyroïdienne normale
- Ils sont hormonodépendants vis-à-vis de la TSH et ont la particularité de fixer l’iode radioactif.
DANS CERTAINS CAS UNE TOTALISATION (DESTRUCTION DES RELIQUATS) ISOTOPIQUE A L'IODE 131
LE PRINCIPE
Ces cancers conservent des propriétés de la cellule thyroïdienne normale. Ils sont hormonodépendants vis-à-vis de la TSH et ont la particularité de fixer l’iode radioactif. S'il y a eu thyroïdectomie totale, l'intervention chirurgicale est complétée par une destruction (totalisation) isotopique à l’iode 131 des reliquats tumoraux. C'est une irathérapie pour laquelle on administrera, habituellement, une dose d'iode radioactif de 100 mCi.
Les résidus thyroïdiens sont capables de capter sélectivement l’iode 131. Ceci permet leur destruction ciblée.
EN PRATIQUE
Les indications
Le traitement n’est indiqué que chez les patients ayant subi une thyroïdectomie totale et présentant une forme à haut risque de récidive. Votre cas sera discuté en RCP en fonction, notamment, du contexte, des données histologiques et de l’âge.
Concrètement...
Le traitement adjuvant par l’iode 131, ou Irathérapie n’est indiqué qu'après une thyroïdectomie totale et chez les patients présentant une forme à haut risque de récidive. L’irathérapie est maintenant réalisé en fonction du risque de rechute, selon les 3 groupes de risque
L’indication sera discutée à l'occasion d'une RCP en fonction, des données histologiques et de l’âge.
La fixation de l’iode 131 nécessite une stimulation préalable par la TSH. Elle peut être réalisée par un sevrage en hormones thyroïdiennes (L-T4) ou par des injections intramusculaires de TSH recombinante humaine.
La dose habituelle est de 30 à 100 mCi [1 110 à 3 700 MBq] d’iode 131.
Les contraintes..
Une hospitalisation en chambre radio-protégée est nécessaire pendant 2 à 5 jours et obligatoire dès que l’activité administrée dépasse 20 mCi [740 MBq]. L’administration d’iode 131 est formellement contre-indiquée en cas de grossesse ou d’allaitement. Une contraception est conseillée pendant les 6 à 12 mois suivant l’administration d’iode 131 en raison d’une majoration transitoire du risque de fausse couche.
Comment juge-t-on de l'efficacité ?
Une scintigraphie corporelle totale est alors réalisée. Elle permet de visualiser d’éventuels foyers tumoraux et de réaliser ainsi le bilan d’extension.
Lorsque la chirurgie a été complète, on observe simplement un reliquat thyroïdien cervical. La présence de fixations en dehors du cou indique l’existence de métastases ganglionnaires ou à distance. Un dosage de thyroglobuline est systématiquement réalisé.
UN TRAITEMENT FREINATEUR PAR LA LEVOTHYROXINE
LE PRINCIPE
La lévothyroxine est administrée à une dose légèrement supra-physiologique pour freiner la sécrétion de TSH après la chirurgie dans les formes considérées à haut risque de récidive et en cas de maladie récidivante ou métastatique.
L’objectif du traitement est de prévenir le risque de récidive et/ou ralentir la progression de la maladie.
En cas de rémission clinique et biologique, il n’est pas recommandé de maintenir le freinage car l’hyperthyroïdie induite peut exposer à des risques cardiaques (troubles du rythme, arythmie complète par fibrillation auriculaire) et osseux (ostéoporose).
EN PRATIQUE...
La TSH est maintenue dans la moitié inférieure des valeurs normales. Le taux de TSH est mesuré au moins 6 semaines jusqu'à optention d'un état d’équilibre après le début du traitement. Sa mesure permet l’adaptation de la posologie. Ensuite, une surveillance annuelle ou biannuelle est suffisante.
Les effets indésirables du traitement freinateur sont faibles : légère augmentation de la fréquence cardiaque, ce qui augmente cependant le risque de fibrillation auriculaire. Il y a également un certain risque d’ostéoporose.
Le traitement des formes rares
EN CAS DE CARCINOME MÉDULLAIRE
La chirurgie est le seul traitement efficace de cette forme de la maladie. Elle doit être plus large et comprendre :
- Une thyroïdectomie totale
- Un curage ganglionnaire jugulo-carotidien et spinal du même côté (homolatéral) en cas de cancer unilatéral de moins de 2 cm ou bilatéral, dans tous les autres cas, notamment en cas d’examen extemporané positif du curage central.
EN CAS DE CARCINOME ANAPLASIQUE
C'est une urgence thérapeutique.
Afin d’éviter une détresse respiratoire, on effectue si possible une thyroïdectomie palliative de désobstruction, le geste étant assez souvent limité à une trachéotomie.
La chirurgie est suivie d’une association radiothérapie-chimiothérapie. Seule la combinaison de plusieurs modalités thérapeutiques peut améliorer le contrôle local.
EN CAS DE LYMPHOME THYROÏDIEN
Dans les formes limitées à la thyroïde, le traitement est habituellement la thyroïdectomie totale suivie ou non d’une radiothérapie externe sur le cou et le médiastin.
Lorsque la tumeur franchit la capsule thyroïdienne et/ou en cas d’extension ganglionnaire, le traitement un associe une chimiothérapie et une radiothérapie externe.
DANS TOUS LES CAS
Une hormonothérapie substitutive de l’hypothyroïdie induite par le ou les traitement sera instituée.
Critères d'une rémission complète
- Thyroglobuline < 1 ng/mL, sous stimulation et/ou < 0.2 ng/mL sous hormonothérapie
- Absence d’anticorps anti-thyroglobuline
- Echographie cervicale normale
En cas de rechute ou de progression
LE CONTEXTE
De 5 à 15% des cancers thyroïdiens différenciés vont évoluer et devenir métastatique, le plus fréquemment aux poumons et à l’os. Dans deux tiers des cas les cancers métastatiques deviennent réfractaires à l’iode131, en particulier dans les formes moins bien différenciées, en cas de métastases volumineuses, et chez des patients plus âgés.
PRECISONS LES TERMES
La définition du cancer thyroïdien iodoréfractaire intègre 4 critères
- Pas de fixation de l’iode 131 des sites métastatiques au diagnostic initial ou en cours de traitement
- Présence d’au moins 1 lésion métastatique ne fixant par l’iode
- Progression tumorale 12-16 mois après l’iode 131 malgré une fixation initiale
- Dose cumulée de 600 mCi sans signe de rémission
Le cancer dit « avancé » ou « agressif » est une entité distincte répondant à plusieurs critères
- Chirurgical : la tumeur est non résécable d’emblée
- Histopathologique : le type histologique est agressif
- Biologiques : la concentration de thyroglobuline fait évoquer une progression métastatique, ou que le cancer est devenu iodoréfractaire
- Morphologiques : la maladie devient métastatique ou localement avancée
- Clinique : si la maladie devient cliniquement parlante avec des risques de complications
Le traitement des rechutes
QUEL(S) TRAITEMENT(S)
Votre cas sera discuté au cours d'une Réunion de Concertation Pluridisciplinaire (RCP) comprenant un endocrinologue, un médecin nucléaire, un chirurgien, un anatomo-pathologiste, un biologiste, un radiologue, un oncologue et un radiothérapeute.
A ce stade, vous pourrez être alors dirigé vers un centre de compétence et pris en charge par le réseau des Tumeurs Thyroïdiennes Réfractaires (TUTHYREF).
LA RECHUTE EST DITE "LOCORÉGIONALE"
Les récidives cervicales surviennent dans 10 à 15 % des cas mais pouvant atteindre 35 % des cas chez les patients considérés à risque élevé. Elles sont localisées dans les ganglions cervicaux dans 80 % des cas.
Dans ce cas le traitement est chirurgical. Il est complété par une irathérapie par l’iode 131. Ce traitement sera éventuellement associé à une radiothérapie externe, s’il n’y a pas de fixation de l’iode radioactif.
IL S'AGIT DE MÉTASTASE(S) À DISTANCE
Elles surviennent chez environ 10 % des patients. Elles affectent les poumons et /ou les os du squelette. Une fixation d’iode 131 est observée chez les deux tiers des patients ayant des métastases.
Un traitement par l’iode 131 (3,7 à 5 GBq) est administré tous les 4 à 6 mois jusqu’à la disparition de toute anomalie est le plus souvent proposé.
En cas de métastase osseuse unique, une opération est envisageable ou une radiothérapie externe.
Une chimiothérapie pourra être proposée, en cas de métastases rapidement évolutives ne fixant pas l’iode 131.
Une rémission complète est obtenue chez la moitié des patients dont les métastases fixent l’iode 131.
Plus de 40 % des patients sont en vie 10 ans après la découverte des métastases. Le pronostic est encore meilleur chez les sujets jeunes ayant une tumeur différenciée et dont les métastases sont petites lors se leur découverte et si elles fixent l’iode 131.
LES THERAPIES CIBLEES
Lorsque les métastases sont disséminées et évolutives, vous pourrez bénéficier des progrès thérapeutiques récents que représentent les thérapeutiques moléculaires ciblées qui permettent d’obtenir des stabilisations, parfois prolongées, dans 30-50 % des cas. Dans tous les cas, il faut maintenir un traitement de LT4 à dose frénatrice
- Cancers médullaires avancés / métastatiques : vandétanib (Caprelsa™) oral 300 mg/j
- Cancers différencié avancés / métastatiques résistants à l’iode radioactif : sorafenib (Nexavar™) à la dose de 800 mg/j
- Cancer anaplasiques : habituellement : doxorubicine 60 mg/m² + cisplatine 70 mg/m² tous les 21 jours ou paclitaxel IV hebdomadaire
- Cas particuliers
- Crizotinib (Xalkori™) serait utile pour le traitement des cancers anaplasiques avec mutation de ALK folliculaire, médullaires ou papillaires avec mutation de MET
- Vemurafenib (Zeboraf™) ne serait efficace que pour les cancers de la thyroïde avec mutation BRAFV600E
Le cas des microcancers papillaires
LE CONTEXTE
Ce sont des tumeurs dont la taille est inférieure à 1 cm. Elles sont très fréquemment rencontrées et leur incidence augmente avec l'âge. Leur incidence est estimée à 5 à 36 % de la population générale.
En l'absence d'atteinte ganglionnaire et/ou de métastase(s( à distance, une simple surveillance est l'attitude habituelle. Cette attitude est dictée par leur faible récurrence (1 à 5 %) comparée aux risques éventuels de la chirurgie (1 à 3 %). De plus la mortalité liée à ces microtumeurs est estimée, pour les tumeurs palpables à moins de 0,4 %.
LES CRITÈRES
Trois conditions doivent être remplies pour proposer une "surveillance active"...
- L'absence d'atteinte des ganglions à l'examen clinique
- L'absence de signes d'extension de la maladie lors de l'examen échographique
- Un nodule situé à distance du nerf récurrent et de la trachée
LA SURVEILLANCE ACTIVE
Le diagnostic est établi grâce à une biopsie réalisée à l'aiguille fine. La surveillance "active", si vous avez plus de 40 ans, consistera, en plus de l'examen clinique, en des échographies programmées tous les 6 ou 12 mois.
@ Source : Lancet Diabetes Endocrinology 2016;4:933–42
Vous êtes enceinte…
LE CANCER EST DÉCOUVERT PENDANT LA GROSSESSE
Ce n’est pas une situation tout à fait exceptionnelle car il concerne, environ, une femme enceinte sur 1 000.
L’absence d’agressivité particulière de la maladie durant la grossesse explique pourquoi les spécialistes tendent à différer, si possible l’opération après l’accouchement.
Dans tous les cas, le traitement par l’iode 131, s’il est indiqué, se fait après l’accouchement et la période d’allaitement.
VOUS ÊTES EN TRAITEMENT ET VOUS ÊTES ENCEINTE
La grossesse chez une femme ayant eu un cancer de la thyroïde ne pose pas de problème majeur. Il ne semble pas, non plus, exister de risque, notamment génétique, pour le fœtus.
Cependant, il est fortement recommandé d’attendre, au moins, un an après un traitement par l’iode 131 avant d’envisager une grossesse.
Le traitement freinateur par L-thyroxine est maintenu durant la grossesse, mais nécessite souvent une modification, à la hausse, des doses de médicaments généralement dès le 2 ème mois pour maintenir le taux de T4 libre dans le tiers supérieur de la zone normale.
Un contrôle du bilan hormonal thyroïdien sera pratiqué dès le premier trimestre et répété tous les deux mois.
Après l’accouchement, le traitement antérieur à la grossesse est repris.
Mise à jour
19 octobre 2024