De l'EGFR
Deux familles de médicaments
LES ANTICORPS MONOCLONAUX ACTIFS PAR VOIE INJECTABLE
Les anticorps monoclonaux sont de grosses molécules actives par voie injectable. Ils bloquent le domaine extra-cellulaire du récepteur et provoquent son internalisation dans la cellule. On pourrait, par analogie, dire qu’ils bouchent le trou de serrure ou font disparaître la serrure…. Il s’agit, par exemple, du :
- Trastuzumab (Herceptin™), un anticorps dirigé contre le récepteur HER2
- Cétuximab (Erbitux™), un anticorps dirigé vers le récepteur EGFR
LES PETITES MOLÉCULES INHIBITRICES DE LA TYROSINE KINASE ACTIVES PAR VOIE ORALE
Ces petites molécules chimiques sont actives par voie orale et agissent sur le domaine intracellulaire du récepteur. Les inhibiteurs de la tyrosine kinase bloquent, à l’intérieur de la cellule, une enzyme qui est associée au récepteur de l’EGF. Elles demeurent actives lorsqu’un ligand est fixé sur le récepteur. Pour reprendre l’image précédente, ils empêchent la clé de bouger le pêne de la serrure et la porte ainsi ne peut plus s'ouvrir.
Au cours des années 1970...
La génistéine, extraite du soja, fut le premier composé sélectionné par criblage, à montrer une activité inhibitrice de la kinase associé au récepteur de l'EGFR. Par la suite, certains composés naturels ont montré leur capacité à inhiber l'activité de kinases in vitro de certaines cellules comme la staurosponine ou la quercetine.
En dépit d'une bonne sélectivité et spécificité sur des récepteurs à tyrosine kinase (RTK) isolés, ces molécules se sont révélées, par la suite, être inactives en clinique.
A la fin des années 1980...
Les chercheurs sont parvenus à synthétiser des analogues structuraux de ces composés naturels pour avoir des molécules actives in vivo . Cette recherche à permis la synthèse du Glivec™ .
À partir des années 1990...
La découverte d'une nouvelle classe inhibant les tyrosines kinases, les 4-anilino-quinazoline a permis la mise au point de nombreuses molécules actives.
Plusieurs molécules, en « inib », sont maintenant commercialisées dont, par exemple, l'erlotinib ou Tarceva™, le géfitinib ou Iressa™, l'afatinib et le lapatinib ou Tykerb/Tyverb™.
Les anticorps monoclonaux contre l'EGFR
LE CETUXIMAB (ERBITUX™)
Ce que c’est…
C’est un anticorps monoclonal chimérique (d’où le suffixe ximab ) de la catégorie des immunoglobulines IgG1 qui cible le récepteur de l’EGFR ou ErbB1, HER1.
L’anticorps monoclonal inhibe la capacité de l’EGFR à stimuler l'activation de la tyrosine kinase. Ce blocage entraîne une inhibition de la croissance tumorale en entravant les effets de l'activation du récepteur EGFR, notamment l'invasion tumorale et les métastases, la réparation cellulaire et l'angiogenèse.
Ce médicament représente une avancée importante dans le traitement de certains cancers ORL et des cancers colorectaux métastatiques.
Dans cette dernière indication, Erbitux™ ralentit la progression de la maladie de plus de 4 mois et réduit la taille des tumeurs d'au moins 50 % chez 23 % des sujets. De plus, les équipes de recherche ont observé la stabilisation ou l'amélioration de l'état plus de la moitié des patients.
Les indications officielles
Traitement du cancer colorectal métastatique avec gène KRAS de type sauvage exprimant le récepteur du facteur de croissance épidermique (EGFR) :
- En association avec une chimiothérapie à base d'irinotécan
- En association au FOLFOX, en première ligne
- En monothérapie après échec d'un traitement à base d'oxaliplatine et d'irinotécan et en cas d'intolérance à l'irinotécan.
Traitement de carcinomes épidermoïdes de la tête et du cou en association avec :
- La radiothérapie en cas de maladie localement avancée,
- La chimiothérapie à base de platine en cas de maladie récidivante et/ou métastatique
En pratique…
C’est un médicament qui s’administre en perfusion de 400 mg/m² puis à 250 mg/m² toutes les semaines.
Sa tolérance est, en général, bonne. On peut, cependant observer des éruptions cutanées rappelant des poussées d’acné, des modifications des ongles et des cheveux.
LE PANITUMUMAB (VECTIBIX™)
Généralités
C’est un anticorps monoclonal humain, d’où le suffixe mumab , bâti à partir d’une immunoglobuline de type IgG2, donc mais dénué d’activité ADCC. Il est produit par génie génétique et dirigé contre l'EGFR.
Les indications officielles
Le Vectibix TM est indiqué en monothérapie pour le traitement des patients atteints de cancer colorectal métastatique exprimant l'EGFR et présentant le gène KRAS non muté (type sauvage), après échec des protocoles de chimiothérapie à base de fluoropyrimidine, oxaliplatine et irinotécan.
Son administration
Il s’administre en perfusion intraveineuse de 60 minutes. La dose recommandée est de 6 mg/kg tous les 14 jours.
La tolérance
Elle est généralement acceptable. Les effets secondaires possibles, mais rares, seront, de toute façon, anticipés par l’équipe soignante. Il peut s’agir : d’éruptions cutanées (rash), des diarrhées, un état de fatigue et des réactions lors de l’injection du médicament.
Les inhibiteurs de la tyrosine kinase (ITK) associée à l’EGFR : les inibs
- Cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) localement avancé ou métastatique, en première ligne de traitement chez les patients présentant des mutations activatrices de l'EGFR; en switch maintenance dans le cas d'une maladie stable après une première ligne de chimiothérapie ; en seconde ligne chez les patients avec des tumeurs sans mutations activatrices de l'EGFR,
- Cancer du pancréas en association à la gemcitabine dans le traitement des formes métastatique.
En pratique…
La posologie quotidienne de Tarceva™ est de 150 mg, à prendre au moins une heure avant ou deux heures après un repas.
Les effets secondaires sont, le plus souvent, assez faciles à contrôler, mais peuvent être assez handicapants car il s'agit d'un traitement souvent prolongé. On peut observer des diarrhées, des éruptions cutanées de durée variable, pouvant intéresser tout le corps, parfois véritable acné du visage et du corps, plus rarement, des céphalées, des mucites.
LE GEFITINIB (IRESSA™)
La molécule
Le géfitinib est une petite molécule inhibitrice sélective de la tyrosine kinase du récepteur du facteur de croissance épidermique.
Ce traitement n'est utile que pour les patients ayant une tumeur avec mutations activatrices de la tyrosine kinase de l'EGFR. Aucune activité clinique significative n'a été montrée chez les patients ayant une tumeur sans mutation de l'EGFR.
L'indications homologuée
Traitement du cancer bronchique non à petites cellules localement avancé ou métastatique avec mutations activatrices de l'EGFR-TK.
Les problèmes dermatologiques sont habituels et communs à cette classe de médicaments.
LE GIOTRIF™ (AFATINIB)
C'est un inhibiteur de seconde génération actif sur les formes mutées de l'EGFR actif par voie orale. Il est actuellement indiqué en monothérapie dans les traitements suivants :
- Patients naïfs jamais traité par un anti EGFR atteints d’un cancer bronchique non à petites cellules localement avancé ou métastatique qui présente une (des) mutation(s) activatrice(s) de l’EGFR.
- Patients ayant un cancer bronchique non à petites cellules de type épidermoïde, localement avancé ou métastatique, progressant sous ou après chimiothérapie à base de platine.
La dose quotidienne maximale est de 50 mg.
LE TAGRISSO™ (OSIMERTINIB)
En bref
C'est un inhibiteur de tyrosine kinase irréversible de 3ème génération actif sur l’EGFR et la mutation de résistance T790M.
Cette molécule demeure active chez certains malades présentant des mutation de l'EGFR.
Les effets secondaires de cette classe de médicaments
LE CONTEXTE
Le traitement en monothérapie par le tratuzumab (Herceptin ™) n’entraine que peu ou pas d’effets secondaires cutanés. A l'opposé, les problèmes cutanés sont assez nombreux avec les médicaments anti-EGFR.
Plusieurs explications ont été avancées pour expliquer cette différence. Les kératinocytes cutanés expriment de manière concomitante l’EGFR et l’HER2 mais l’intensité de leur expression est différente. L 'HER-2 est faiblement exprimé par les kératinocytes basaux alors que l’EGFR y est fortement exprimé ainsi que sur les kératinocytes des infundibulums folliculaires. Ceci explique probablement en partie l’absence de modification cutanée sous anti-HER2. De plus, l’EGFR joue un rôle important dans les mécanismes contrôlant l’homéostasie de la peau, alors que l’HER-2 est moins impliqué dans ces phénomènes.
LES EFFETS SECONDAIRES
Leur tolérance de ces médicaments est, en général, bonne. Néanmoins, on peut observer, fréquemment les effets secondaires dermatologiques, souvent "annonciateurs" d'unne efficacité clinique :
- Des éruptions cutanées, à type de folliculite, rappelant l'acné
- Une sécheresse cutanée ou xérose
- Des modifications des ongles (paronychies ou périonyxis) survenant après un mois de traitement, chez 10 à 25 % des patients
- Une modification des cheveux peut survenir tardivement après trois à quatre mois de traitement qui est surtout observée avec l’erlotinib. Il peut s'agir d'une alopécie avec une chute des cheveux sur les golfes temporaux et sur le vertex mimant une alopécie androgénique, qui s’accompagne d’une modification de la texture des cheveux qui deviennent duveteux (fins, fragiles), bouclés, difficiles à coiffer
- Un duvet du visage peut apparaître tardivement, principalement avec l’erlotinib et disparaît à l’arrêt du traitement. On peut vous proposer une épilation à la cire ou éventuellement au laser
- Des mucites, avec aphtes et ulcérations ponctiformes de la muqueuse buccale et nasale sont très rarement décrites avec le géfitinib, l’erlotininb et le cétuximab. Des soins locaux antiseptiques en bains de bouche sont suffisants pour contrôler les symptômes.
En résumé
Type |
Molécules |
Cibles |
Indications |
---|---|---|---|
Anticorps monoclonaux |
Herceptin™ Erbitux™ Vectibis™ Lymphocid™ |
HER2 EGFR EGFR EGFR |
Sein, estomac Côlon , ORL Côlon Lymphomes |
Inhibiteurs de tyrosine kinase (ITK) |
Tarceva™ Iressa ™ Tykerb™ Gilotrif™ Tagrisso™ |
EGFR EGFR EGFR/Erb-B2 EGFR/Erb-B2 muté EGFR/Erb-B2 muté |
Poumon, pancréas Poumon Sein, poumon Poumon |
Mise à jour
17 mai 2021